L’écrivain Algérien Boualem Sansal, invité d’honneur à la Foire du Livre de Jérusalem
De Jean-Pierre Lledo
Menacé par les islamistes, Jean-Pierre Lledo a quitté l’Algérie, en 1993. Il a réalisé plus d’une vingtaine de films. Deux longs-métrages de fiction, et quatre longs-métrages documentaires distribués en salles de cinéma en France. Le dernier, ‘’Algérie, histoires à ne pas dire’’ a été interdit en Algérie. Il réalise actuellement un film en Israël…
Il nous écrit : « La participation de mon ami, le romancier algérien Boualem Sansal, à la Foire du Livre de Jérusalem du 12 au 17 Mai, dont il sera l'invité d'honneur, c’est évident, sera un événement.
De par la stature de l'écrivain, sans aucun doute le plus grand romancier algérien, et de l'intellectuel qui est le premier et sans doute le seul du monde arabe à s'être engagé dans une lutte don quichotesque contre tous ses Tabous, et notamment ceux qui agrègent le mieux toutes les catégories des populations arabo-musulmanes : le nationalisme, l'islam, et l'antijuivisme.
Mais aussi parce qu'il sera le premier intellectuel algérien, habitant encore en Algérie, à se rendre officiellement en Israël. D'autres, Algériens ou d'autres pays arabes, l'ont déjà fait dans le passé. Mais sans publicité.
Il fallait donc s'attendre à des réactions négatives. La première vient de tomber : celle du HAMAS palestinien. Qui sera sans doute suivie d'une quantité d'autres.
Boualem va avoir besoin de toute notre solidarité. Surtout parce qu'il retournera en Algérie.
Sa participation à la Foire est un acte plus que courageux. Et elle va mettre tous les intellectuels du monde arabo-musulman face à l'obligation de se découvrir et de prendre position.
J'espère que beaucoup d'entre eux saisiront l'occasion pour s'affirmer comme des penseurs libres de leurs gouvernements et des mouvements totalitaires islamistes, baathistes, et nationalistes.
J'espère aussi que les intellectuels du ''monde libre'' ne perdront pas cette occasion pour dire qui pratique la liberté d'expression, et qui, l'apartheid.
Pour ceux qui l'ignoreraient, je signale que le seul pays du Moyen Orient où les Musulmans ne s'entretuent pas, et où la liberté d'expression est totale, c'est Israël. Pays où s'expriment librement toutes les opinions concernant le conflit israélo-palestinien, et où l'on a vu même un député arabe de la Knesset, Tibi, devenir le secretaire d'Arafat durant des négociations, ce qu'il continue de faire au service d'Abou Mazen.
Alors que du côté palestinien, Hamas comme Autorité Palestinienne d'Abou Mazen, on en est à la chasse de tout citoyen soupçonné de ''trahison''.
En attendant et pour celles et ceux qui n'ont rien lu encore de lui, commencez par Le Village de l'Allemand, son avant dernier roman, ou alors le dernier, roman autobiographique, Rue Darwin.
Les intellectuels qui préféreront s'aligner sur les islamo-fascistes du HAMAS, devront commencer par demander la démission du Président de la République Bouteflika qui emploie toujours et depuis 3 mandats, la Ministre de la Culture qui fut même au début sa Porte Parole, Khalida Toumi, ex-Messaoudi, qui séjourna en Israël, dans les années 90, lorsqu'elle combattait les islamistes.
Pour se rattraper sans doute, elle déclara, en tant que Ministre en 2008, qu'elle travaillait à ''déjudaïser'' la musique andalouse !!!!!
J'espère aussi que les intellectuels et les artistes du monde arabo-musulman qui se sont rendus en Israël par le passé, le diront à cette occasion. »
© J.-P. Lledo
Boualem Sansal, né en 1949 à Theniet El Hadj, petit village des monts de l’Ouarsenis, en Algérie. Principalement romancier mais aussi essayiste, il est censuré dans son pays d'origine (dans lequel il habite pourtant toujours) à cause de sa position très critique envers le pouvoir en place. Il est en revanche très reconnu en France et en Allemagne, pays dans lesquels ses romans se vendent particulièrement bien, et où il a reçu de nombreux prix.
Boualem Sansal a une formation d'ingénieur (de la prestigieuse École Nationale Supérieure des Télécommunications de Paris) et un doctorat d'économie.
Il a été enseignant, consultant, chef d'entreprise et haut fonctionnaire au ministère de l'Industrie algérien. Il est limogé en 2003 pour ses prises de positions critiques contre le pouvoir en place particulièrement contre l'arabisation de l'enseignement.
Son ami Rachid Mimouni (1945-1995), l'encourage à écrire. Boualem Sansal publie son premier roman « Le Serment des Barbares » en 1999 qui reçoit le prix du premier roman et le prix des Tropiques. Son livre « Poste restante », une lettre ouverte à ses compatriotes, est resté censuré dans son pays. Après la sortie de ce pamphlet, il est menacé et insulté mais décide de rester en Algérie. Un autre de ses ouvrages, « Petit éloge de la mémoire » est un récit épique de l'épopée berbère. Boualem Sansal est lauréat du Grand Prix RTL-Lire 2008 pour son roman « Le Village de l'Allemand » sorti en janvier 2008, roman qui est censuré en Algérie, car il fait le parallèle entre islamisme et nazisme.
Le livre raconte l'histoire du SS Hans Schiller, qui fuit en Egypte après la défaite allemande, et se retrouve ensuite à aider l'armée de libération algérienne, pour finalement devenir un héros de guerre et se retirer dans un petit village perdu. Le livre s'inspire d'un destin réel, découvert par la presse dans les années 80.
Le 9 juin 2011, il remporte le Prix de la Paix des Libraires allemands, pour la manière dont il "critique ouvertement la situation politique et sociale de son pays".
En mars 2008, il choisit de se rendre au Salon du Livre de Paris, malgré la polémique soulevée dans le monde arabe quant au choix d'Israël comme invité d'honneur et l'appel au boycott venant des pays arabes et de certains intellectuels. Il s'en explique par la formule : "Je fais de la littérature, pas la guerre.", et en ajoutant : "La littérature n'est pas juive, arabe ou américaine, elle raconte des histoires qui s'adressent à tout le monde." Ce choix aggrave sa situation en Algérie.
En 2011, il publie un nouveau roman, Rue Darwin, l'histoire d'une famille prise dans la guerre d’Algérie. Un livre très personnel, écrit trois mois après la mort de sa mère. Le personnage de Yaz ressemble par beaucoup à Boualem Sansal ; par ailleurs, la Rue Darwin est une rue où l'auteur a vécu dans son enfance, à cent mètres de la maison d'Albert Camus.
Il est également connu pour ses propos critiques envers toute forme de religion, et l'Islam en particulier : "La religion me paraît très dangereuse par son côté brutal, totalitaire. L'islam est devenu une loi terrifiante, qui n'édicte que des interdits, bannit le doute, et dont les zélateurs sont de plus en plus violents. Il faudrait qu'il retrouve sa spiritualité, sa force première. Il faut libérer, décoloniser, socialiser l'islam.".
Il habite près d'Alger, dans la ville de Boumerdès.
http://boualemsansal.blogspot.fr/
http://www.medi1.com/player/player.php?i=4918796 (à propos du sexisme)
Boualem Sansal lance un appel à la société civile des pays arabes
Boualam Sansal
« L’écrivain algérien Boualem Sansal a été l’hôte le week-end dernier de la Fondation allemande Allianz Stiftung Forum, près de la célèbre "Porte de Brandenburg" de la ville de Berlin.
Lauréat pour cette année du Prix de la Paix des Libraires Allemands, l’auteur du roman Le village allemand ou le Journal des frères Schiller a consacré devant un nombreux public, composé de journalistes, écrivains, universitaires et personnalités politiques, une grande partie de son intervention à la situation sociopolitique de l’Algérie.
Répondant à une série de questions de Wolgang Heiles, animateur télé, écrivain et journaliste, Boualem Sansal n’a pas hésité à relater avec des exemples et chiffres concrets les évènements majeurs que traverse l’Algérie dans ces moments importants du "printemps arabe". Il a rappelé que l’Algérie a tenté déjà sa révolution pour la transition démocratique en octobre 1988. Cette révolution fut vite récupérée par le mouvement islamiste salafiste et tous les opportunistes nationalistes tapis dans les institutions. "Ce qui a abouti par une barbarie et à un massacre de civils, de milliers de citoyens déplacés et de cadres exilés", a affirmé l'écrivain algérien.
Mettant les pays européens devant leurs responsabilités, Boualem Sansal a rappelé à l’assistance que plusieurs dirigeants de la mouvance islamiste ont trouvé refuge et asile dans les capitales de ces pays d’où ils ont appelé au "djihad" sans aucune contrainte, voire avec la complicité et le laxisme de gouvernements européens. Il a aussi rappelé que les dictateurs de la région nord-africaine étaient aussi pour des intérêts économiques et stratégiques, ménagés par leurs homologues occidentaux.
Revenant sur l’actualité qui prévaut dans le monde arabe, le conférencier a insisté sur le "dégagement" des dictateurs arabes qui reste nécessaire mais pas suffisant. "On doit rester très vigilant ! La révolution doit non seulement abattre les fondements même du système despotique et archaïque mais aussi éveiller les consciences et pousser au changement radical des mentalités et des comportements du citoyen afin d’installer des institutions véritablement démocratiques et des Etats de droit...", a-t-il martelé.
En citant l’exemple du CNT en Libye, Sansal a fait remarquer au public, extrêmement attentif, qu’un dirigeant de cette instance transitoire a déclaré publiquement que la nouvelle constitution de ce pays post-Kadhafi, sera d’inspiration de la "charia" !
Réaliste mais optimiste sur l’avenir de ces pays secoués par ces révoltes et de la fragilité de leurs jeunesses laminées par le chômage, la corruption, la misère, le mépris, le régionalisme, le tribalisme et un système éducatif moribond et sinistré, le conférencier a surpris par son franc-parler. Il a insisté sur le fait que le danger plane toujours, il est d’actualité. Hormis la Tunisie, les islamistes peuvent prendre le pouvoir avec des élections libres et démocratiques, a-t-il déclaré.
L’écrivain Boualem Sansal a appelé la société civile en Algérie et la communauté à l’étranger ainsi que les intellectuels, les syndicats, les associations et les partis politiques d’obédience démocratique des pays arabes à redoubler de mobilisation et d’efforts pour ne pas trahir ces jeunes qui se sont sacrifiés pour le changement, la dignité, les droits de l’Homme et la démocratie. "Les forces du progrès des pays occidentaux doivent aussi leur apporter leurs aides et solidarité", a-t-il conclu.
Boumediene Missoum, Berlin (Allemagne) »
Source Le Matin DZ
http://www.lematindz.net/news/5646-boualem-sansal-lance-un-appel-a-la-societe-civile-des-pays-arabes.html
Le minaret qui cache la forêt
http://www.medi1.com/player/player.php?i=4503955