Les grands penseurs du café du commerce électronique
La bêtise crasse, dont est affectée une très large proportion de l'humanité, n'a rien gagné à se voir en quelque sorte « couverte » par les généreux principes démocratiques qui gouvernent nos mœurs et inspirent nos lois. Loin de nous l'idée que les choses iraient en empirant : tous les exemples que nous propose ou impose l'Histoire (celle qui cantonne son champ d'investigation dans l'espace temporel soumis au mode d'attestation de l'écriture) nous confortent dans l'idée que cette bassesse et cette stupidité ne sont nullement le fait d'une « époque », mais plutôt une donnée constitutive de l' « identité spécifique » de l'Homo Sapiens (pour ne parler que de lui et laisser en suspens toute hypothèse concernant son malheureux concurrent néandertalien et, plus anciennement encore, Erectus).
Le témoignage de cette niaiserie se trouve renforcé par l'initiative purement démagogique d'Internet, qui consiste à offrir aux plus ineptes, sots, infréquentables, des désœuvrés chroniques ou momentanés une tribune accueillante aux plus répugnants ou imbéciles « commentaires » qui les feraient conspuer s'ils s'avisaient de les proférer en public (ce que leur interdirait probablement, non pas la pudeur, mais la connaissance instinctive qu'ils ont de leur affligeante connerie.
Que nombre de gens soient stupides, c'est une chose que l'on a été amené à comprendre dès l'enfance ; que les crétins aient du mal à se résigner à se taire, on ne le sait que trop. En revanche, que des individus, supposés capables de jugement et d'évaluation, osent, sous couvert d'un très pernicieux anonymat, faire leurs les absurdités, souvent scandaleuses, monstrueuses, humiliantes pour ce que l'on croit et espère savoir de l'espèce humaine, dont nous inondent ces idiots souvent prétentieux, voilà qui nous indigne et nous stupéfie ; voilà qui nous invite à proclamer notre mépris pour ces énergumènes qui, au lieu de filtrer à bon escient les dits « commentaires », semblent se complaire à privilégier les plus stupides, les plus indécents, les plus vulgaires, les plus nuls.
Si l'on ne peut s'empêcher d'y jeter un coup d'œil chaque fois que l' « information » déclencheuse laisse miroiter un déluge d'insanités et de niaiseries, c'est que l'on est sûr d'y trouver une fois de plus l'occasion de prendre un peu plus le large vis-à-vis d'une espèce capable d'une telle bassesse (celle des crétins d'« intervenants » crétins et celle des cyniques et malfaisants « sélectionneurs » qui, visiblement, choisissent de préférence ce qui peut le mieux nous donner honte d'appartenir à cette espèce-là.
C'est une mine d'arguments confortant le bien-fondé du réflexe de misanthropie qui ne peut éviter de venir nous frapper au cœur et à l'esprit, dès lors qu'on a pris pour modèle la crème de l'humanité, celle qui s'est toujours inscrite en faux et tenue à l'écart vis-à-vis du déluge excrémentiel, dont le dévoiement de l'idéal démocratique a fait son mode de déjection.