Rapport Moreau : pourquoi taxer les retraités n'est plus tabou
Le Monde | 19.06.2013 à 19h16 • Mis à jour le 20.06.2013 à 08h24 | Par Jules Bonnard
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Si personne ne conteste la nécessité de renflouer un système largement déficitaire, la répartition de l'effort demandé entre les retraités, les salariés et les entreprises est en revanche plus sujet à controverse. Le rapport Moreau propose de le fairesupporter soit à parité par les actifs et les retraités, soit aux deux tiers par les actifs. A titre d'exemple, il liste différentes mesures qui pourraient permettre de dégager ces 7 milliards d'euros.
UN EFFORT SUPPORTÉ AUX DEUX TIERS PAR LES ACTIFS
Le premier scénario (1er et 2e cas dans notre infographie ci-dessus) présente une répartition "proportionnée" des efforts. Les deux tiers sont supportés par les employeurs, essentiellement par une hausse de 0,1 point par an du taux de cotisation déplafonné, mesure qui devrait rapporter 3 milliards d'euros. Actuellement, ce taux est de 1,70 %, dont 95 % est pris en charge dans la cotisation patronale. Le reste de la participation des actifs est obtenu par un allongement de la durée de cotisation à 43 ans et une sous-indexation des salaires portés au compte.
Les retraités ne participent qu'à hauteur d'un tiers à l'effort demandé. Selon les variantes proposées, soit les pensions soumises à la CSG sont sous-indexées, soit la CSG retraités fait l'objet d'une "hausse ciblée", accompagnée d'une baisse du plafond de l'abattement fiscal – des propositions déjà inscrites dans un rapport de la cour des comptes publié en septembre 2012. Cette deuxième variante nécessiterait également de faire appel à des "recettes de poche" du côté des prélèvements sociaux sur les revenus du capital.
UNE FISCALISATION DES MAJORATIONS POUR ENFANTS
Dans un deuxième scénario (3e et 4e cas de notre infographie), l'effort est cette fois-ci réparti "à parité entre cotisants et retraités". Ces derniers voient donc leur participation augmenter pour atteindre 50 % des 7 milliards d'euros demandés. En particulier, les majorations pour enfants sont fiscalisées. Versées aux personnes retraitées qui ont élevées au moins trois enfants, celles-ci augmentent actuellement de 5 à 10 % leurs pensions.
Augmenter la participation des retraités apparaît "envisageable", selon le rapport Moreau, qui note que les précédentes réformes des retraites ont davantage sollicité les actifs. Si les revenus des retraités restent en moyenne inférieurs à ceux des actifs, leur poids démographique (et électoral) augmente chaque année. Ils représentent aujourd'hui environ un tiers des ménages. Le 13 mars 2013, un accord national interprofessionnel sur les retraites complémentaires avait commencé à solliciter cette population en abaissant la revalorisation des pensions pendant trois ans. Cette fois-ci, les mesures préconisées par le rapport Moreau ciblent les pensions soumises à la CSG (contribution sociale généralisée).
Sur le plateau de "Capital" (M6), le 16 juin, François Hollande n'a pas voulu anticiper sur la concertation avec les partenaires sociaux en annonçant les mesures qui seront choisies par le gouvernement. Tout juste sait-on que la durée de cotisation sera allongée. La réforme finale, qui devraient être présentée à la rentrée, ne choisira pas nécessairement un des scénarios proposés par le rapport Moreau, mais pourrait composer une combinaison inédite des mesures préconisées.