En 2012, quel est le pays européen où les femmes meurent parce que l'avortement y est illégal?
Le gouvernement irlandais s'est engagé mardi à adopter une loi qui permettra bientôt aux femmes d'avoir recours à l'avortement si la poursuite d'une grossesse menace leur vie - y compris de leurs propres menaces de se suicider en cas de refus celui-ci.
Cette annonce intervient après des décennies d'inaction sur l'avortement en Irlande, et quelques semaines après que le pays à prédominance catholique ait eu à faire face à des critiques internationales sur la mort d'une femme indienne hospitalisée en Irlande pour une fausse couche imminente.
Le Ministre de la Santé James Reilly a déclaré que des 'auditions parlementaires sur la question commenceront le mois prochain et que les législateurs recevraient un projet de loi à Pâques: ils seroent appelés à voter sur ce sujet d'ici l'été. Ce sera la première fois que les législateurs irlandais auront à voter sur l'avortement, sans doute une des questions les plus controversées dans un pays dont la constitution interdit la pratique.
Le gouvernement du Premier ministre Enda Kenny a promis une réponse rapide après la mort le 28 octobre de Savita Halappanavar, une dentiste de 31-ns. Les autorités n'avait pas rendu publique la mort de cette femme à l'époque, mais son conjoint accuse les médecins de l'hôpital universitaire de Galway d'avoir refusé de mettre fin à la grossesse car le fœtus de 17 semaines, pourtant condamné , avait encore un battement de coeur.
Savita Halappanavar a passé trois jours dans une douleur croissante avant que le fœtus ne meurt. Les restes de ce dernier furent enlevés chirurgicalement. Elle a ensuite succombé à un empoisonnement du sang et à une défaillance des organes trois jours après. Son mari a refusé de coopérer avec les deux enquêtes officielles irlandaises dans sa mort et a l'intention de poursuivre l'Irlande devant la Cour européenne des droits de l'homme.
Depuis deux décennies, les gouvernements irlandais successifs ont refusé de faire passer une loi en faveur d'un arrêt de 1992 de la Cour suprême qui statuait que l'avortement devait être légalisé en Irlande dans des cas exceptionnels où la grossesse met en danger la vie d'une femme. La plus haute juridiction de l'Irlande avait jugé qu'une jeune fille de 14 ans qui avait été violée par un voisin devait pouvoir avoir recours à l'avortement parce qu'elle faisait des menaces crédibles de se suicider en cas de refus celui-ci.
En 1992 et 2002, les gouvernements ont demandé aux électeurs d'approuver les amendements constitutionnels qui permettraient des avortements dans des circonstances essentielles médicalement parlant, mais excluant les menaces de suicide comme motifs valables. Les électeurs ont rejeté les propositions à ces deux occasions.
Les conservateurs catholiques s'opposent au tribunal qui a justifié la menace de suicide comme motif valable, faisant valoir qu'il pourrait être utilisé pour élargir l'accès à l'avortement au-delà des cas relativement rares où une grossesse met en danger la vie d'une femme.
Reilly a déclaré que le gouvernement ferait en sorte "que la question du suicide ne soit pas utilisé abusivement comme dans d'autres pays.
Kenny, lui-même un catholique conservateur au pouvoir depuis Mars 2011, a vivement critiqué le Vatican sur son implication dans la dissimulation chronique des abus sexuels sur des enfants par des représentants de l'Eglise en Irlande. Il affirme que tous les députés de son parti devront voter en faveur du projet de loi gouvernemental sur l'avortement ou risquer une éventuelle expulsion du parti.
Les quatre archevêques d'Irlande ont publié une déclaration commune demandant au gouvernement d'exclure toute menace de suicide comme motif d'octroi de l'avortement - et a appelé les législateurs à résister à l'insistance de Kenny sur la discipline de parti.
Le gouvernement a normalement une majorité inattaquable au parlement, mais un vote sur l'avortement pourrait la menacer. Une douzaine de députés du parti de Kenny ont déjà dit qu'ils s'opposent à voter en faveur d'un accès à l'avortement. Cela signifie que Kenny pourrait avoir besoin du soutien de députés de l'opposition de gauche pour assurer son passage.
Les archevêques assurent que le jugement de la Cour suprême était une erreur et que l'adoption d'une loi à l'appui de cette décision "serait à la fois tragique et inutile."
«La vie d'un nombre incalculable d'enfants à naître dans ce pays dépendra des choix qui seront faits par nos représentants», les archevêques écrit.
Ils demandent que le gouvernement garantisse aux législateurs «le respect absolu de la liberté de conscience. Personne n'a le droit de forcer ou de contraindre une personne à agir contre sa conscience. "
M. Berry Kiely, porte-parole d'un groupe de pression anti-avortement irlandais appelé la Campagne Pro Vie, a déclaré que la clause de suicide serait exploitée par les femmes enceintes et représente le choix de tuer un bébé à naître, pas une exigence médicale pour sauver la vie d'une femme.
"Une femme qui dit qu'elle est suicidaire à cause d'une grossesse, ce qu'elle dit est qu'elle ne veut pas d'un bébé vivant à la fin de cette procédure," a dit Kiely. «Vous êtes réellement, dans cette situation, dans une proposition qui vise directement et intentionnellement à assurer la mort de son bébé."
Le jugement de la Cour suprême a légalement donné aux hôpitaux irlandais le droit de commencer à fournir des avortements, mais les médecins refusent souvent de les pratiquer, invoquant le risque de faire face à des poursuites en raison du refus des législateurs de fournir un cadre légal définitif à la question.
Il y a deux ans, l'Irlande a perdu un procès devant la Cour européenne des droits de l'homme porté par trois femmes irlandaises ayant déclaré que leur santé avait été inutilement compromise par l'absence de lois explicites et claires sur l'avortement en Irlande.
Le tribunal a convenu avec les justiciables que l'Irlande n'avait pas réussi à fournir un accès aisé à l'information sur le moment où l'avortement peut être effectué légalement dans le pays. Il a également jugé qu'une femme, une survivante d'un cancer, aurait dû recevoir un avis médical clair en Irlande sur les risques pour sa santé dus à sa grossesse. Elle avait finit par faire des recherches sur Internet, puis un voyage en Angleterre pour avorter, mais a souffert de graves complications médicales en raison du retard impliqué.
Environ 4000 femmes voyagent de la République d'Irlande chaque année d'avortements en Angleterre, où la pratique a été légalisée en 1967.