Nous ne quitterons la place que par la force des baïonnettes !
Par Pauline Ebrart
Ainsi s’exprima le député Mirabeau qui voulait rédiger la Constitution pour le peuple, face au représentant du roi, monsieur de Brézé, qui voulait l’en empêcher. Hier l’Histoire aurait pu se reproduire, mais hélas, ce ne fut pas le cas et « le roi » gagna sur le peuple, en faisant voter, sans concertation et référendum, la loi pour le mariage pour tous.
Le président de l’Assemblée Claude Bartolone, le Brézé d’hier, fit brutalement rejeter de l’hémicycle des « révolutionnaires » qui étaient parvenus à entrer avec des banderoles pour dire leur opposition à cette loi ; et pourtant, ces derniers tels les représentants du Tiers Etat de 1789 qui voulaient bâtir la Constitution, étaient porteurs de la voix du peuple et de ses revendications bafouées par un gouvernement redevenu monarchique.
Et hier encore, les forces de l’ordre dans les rues ont repoussé brutalement des Français qui refusaient de se laisser manipuler par une Assemblée asservie au pouvoir en place et plus du tout en mesure d’être garante des libertés du peuple.
Alors dans cette République de 2013 où les valeurs qui l’ont fondée sont malmenées et piétinées, il est important de se rappeler le nom et les actions de ceux qui courageusement la bâtirent, et comment ils le firent face aux pouvoirs en place.
5 mai 1789, les Etats généraux s’ouvrent à Versailles, non au château, mais dans l’hôtel des Menus Plaisirs, dont l’agencement permet de recevoir 1200 représentants des Etats Généraux.
C'est déjà là que s'étaient réunies les Assemblées de notables de 1787 et 1788. Cependant, alors qu'ont été prévues des salles particulières pour la noblesse et le clergé, les 600 membres du tiers état ne disposent pas d'une salle qui leur soit propre.
Le Tiers est obligé de se réunir dans la salle générale, ce qui conforte son ambition de représenter la nation tout entière.
Le 17 juin, le Tiers se déclare Assemblée nationale. En réponse, le roi, sous la pression de son entourage et des députés de la noblesse, fait fermer la salle des Menus Plaisirs au motif qu'elle nécessite des travaux avant la séance royale initialement fixée au 22 juin.
Le 20 juin, c'est dans une autre salle, celle du Jeu de Paume, que tous les membres de l'Assemblée - à une exception près - jurent de ne point se séparer avant de donner une Constitution à la France.
Le 21, la salle des Menus Plaisirs étant toujours fermée, ils décident de siéger à l'église Saint-Louis,
Le 23 juin 1789 l'ensemble des députés retrouve enfin la salle des Menus Plaisirs.
Mais, le roi casse les décisions du Tiers et ordonne la délibération par ordre, avant de conclure :
- Je vous ordonne, Messieurs, de vous séparer tout de suite et de vous rendre demain matin dans les chambres affectées à votre ordre, pour y reprendre vos séances.
Les députés de la noblesse et ceux du clergé obéirent à l’injonction du roi et se retirèrent, les autres restèrent à leur place.
Le marquis de Brézé qui représentait le roi dit alors :
- Messieurs, vous connaissez les intentions du roi!
Sur quoi Mirabeau lui adressant la parole répondit :
- Oui, Monsieur, nous avons entendu les intentions qu'on a suggérées au roi, et vous qui ne sauriez être son organe auprès de États généraux, vous qui n'avez ici ni place, ni voix, ni droit de parler, vous n'êtes pas fait pour rappeler son discours. Cependant, pour éviter toute équivoque et tout délai, je vous déclare que si l'on vous a chargé de nous faire sortir d'ici, vous devez demander des ordres pour employer la force, car nous ne quitterons nos places que par la puissance de la baïonnette.
Alors, d'une voix unanime, tous les députés qui étaient restés se sont écriés :
-Tel est le vœu de l'Assemblée !
Voilà ce que transmet l’Histoire, et voilà l’exemple que l’Assemblée devait suivre…
Mais, il semble qu’ainsi que dans la Bible, autre grand exemple, il nous faut maintenant courageusement, sortir les nouveaux marchands du temple, reprendre possession des lieux, et comme Mirabeau dire encore “Nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes”
PE