David Beckham, futur roi du « soccer » américain ?
C'est désormais officiel : une nouvelle franchise de football verra le jour à l'horizon 2016-2017 à Miami, et David Beckham en sera l'heureux propriétaire. L'Anglais l'a annoncé en grande pompe, mercredi 5 février, lors d'une conférence de presse réunissant le patron de la Major League Soccer (MLS), Don Garber, le maire de Miami, Carlos Gimenez, et ses deux associés, son agent Simon Fuller et le milliardaire bolivien Marcelo Claure, devant des centaines de journalistes.
Son club, dont on ne connaît pas encore le nom, deviendra ainsi la 22e franchise de MLS, qui en compte actuellement 19. Deux nouveaux clubs seront en effet lancés en 2015, le New York City Football Club et le Orlando City Soccer Club. Un peu moins d'un an après sa retraite sportive, David Beckham se lance donc dans une nouvelle aventure, avec pour ambition de poursuivre le développement du football aux États-Unis, et de faire de son futur club une marque mondiale. Mais tout Spice Boy qu'il est, la réussite de son projet est encore incertaine.
Comment en est-il arrivé là ? David Beckham est un homme d'affaires avisé, prévoyant, et à l'affût de toutes les opportunités. En rejoignant les Los Angeles Galaxy en 2007, club dans lequel il a évolué jusqu'en 2012, avant de terminer sa carrière au PSG, Becks avait tout simplement négocié une clause dans son contrat lui permettant de créer une franchise en MLS. Le ticket d'entrée, que doit débourser chaque nouveau propriétaire à la Ligue, lui a été octroyé à "prix d'ami", 25 millions de dollars, alors qu'il oscille aux alentours de 100 millions de dollars pour le patron du futur New York FC.
Les dirigeants de la MLS ont donc tout mis en œuvre pour d'abord attirer le joueur Beckham, et ensuite le convaincre de s'investir dans un projet de développement à long terme. Avec sa notoriété, notamment en Asie, ses réseaux, le lien qu'il établit entre la "vieille Europe" et les États-Unis, David Beckham était le candidat idéal pour acquérir une franchise et contribuer au rayonnement de la MLS.
Lire l'article de Marc Roche, correspondant du "Monde" à Londres : Beckham, le footballeur s'en va, la marque reste
Pourquoi Miami ?Même si le soccer gagne chaque année en popularité aux États-Unis, il n'est toujours pas de taille, et ne le sera vraisemblablement jamais, du moins dans son versant masculin, à lutter contre le baseball, le foot US ou le basket. La ville de Miami n'est pas non plus réputée pour la passion sportive de ses habitants, en dépit de la présence de deux clubs majeurs, les Dolphins en NFL, et le Heat en NBA. Avant l'arrivée de l'un des plus grands joueurs de l'histoire du basket Lebron James, le Miami Heat, double champion en titre NBA, faisait rarement salle comble.
David Beckham, installé à Londres depuis sa retraite, aurait pu embrasser un avenir confortable d'ambassadeur de Manchester United, son club de toujours. Mais il se rêve en bâtisseur. "J'ai voulu créer une équipe à un endroit où l'on pouvait commencer de zéro. Je sais qu'il y avait une équipe ici, il y a dix ans, qui a malheureusement disparu, mais je sais que Miami est de nouveau prête pour le football".
La ville a en effet déjà accueilli en son sein un club de football, le Miami Fusion. L'épopée a tourné court, faute de public, et le club a disparu en 2001 après seulement trois ans d'existence. Miami est toutefois une ville cosmopolite, comprenant une importante communauté latino, plus sensible aux subtilités du ballon rond. "Magic city" était la seule mégalopole américaine à ne pas compter de franchise de football. Une anomalie en passe d'être effacée.
Des joueurs et un entraîneur de classe mondiale ? "J'ai une liste", a sobrement répondu Beckham, interrogé lors de la conférence de presse pour savoir si des joueurs avaient déjà été contactés. "Je ne veux pas manquer de respect en donnant des noms, mais certains joueurs m’ont appelé pour me dire : 'Oh, Miami, c’est super !' C’est une bonne chose car on veut les meilleurs joueurs", a expliqué l’Anglais. Pour réussir, le projet de Beckham doit s'articuler autour de joueurs de classe mondiale et d'un entraîneur du même acabit. Les noms d'Alex Fergusson et de Carlo Ancelotti commencent à circuler dans la presse américaine. Pour le premier nommé, Beckham a déjà démenti. Pour le second, par contre...
Son principal défi sera d'attirer des athlètes en pleine force de l'âge, et non des joueurs en fin de carrière qui viennent profiter d'une pré-retraite dorée sous le soleil de Miami. Mais Beckham ne pourra se la jouer comme un Qatari à Miami. Le système de franchises régissant les sports américains l'en empêche. Les contrats des joueurs sont en effets détenus par la Ligue et non pas les propriétaires des clubs. A l'instar des autres sports US, un salary cap fixe une masse salariale annuelle pour chaque franchise, actuellement de l'ordre de 2,81 millions de dollars.
Le salaire de chaque joueur doit être compris entre 44 000 dollars et 350 000 dollars par an. Cependant, afin d’attirer des joueurs de renommée internationale, la MLS a instauré en 2007 la règle du "joueur désigné", également connue sous le nom... de "loi Beckham". Chaque franchise peut engager au maximum trois joueurs désignés. Pour chacun d'entre eux, 335 000 dollars sont prélevés sur la masse salariale et pris en charge par la Ligue, le reste du salaire étant à la charge du propriétaire de la franchise. Ce système produit des effectifs avec des stars surpayées évoluant aux côtés de joueurs sous-payés, comparé aux salaires en vigueur en Europe.
Avec quels associés ? David Beckham, dont la fortune est estimée à 198 millions d'euros, est riche, très riche, mais pas assez pour mener ce projet en solitaire. Lors de sa conférence de presse, il était accompagné de ses deux associés, son agent Simon Fuller, l'homme qui a notamment créé les Spice Girls et l'émission American Idol, et du milliardaire bolivien Marcelo Claure, fondateur de l'entreprise Brightstar Corp, spécialisée dans la distribution de réseaux sans fil.
La future franchise reste ouverte à d'autres investisseurs, et Lebron James est évoqué avec insistance depuis plusieurs semaines. L'intéressé, qui possède depuis 2011 des parts minoritaires dans le club anglais de Liverpool, a d'ailleurs indiqué qu'il serait ravi de "faire partie de cette aventure. David Beckham est un ami et Miami est une ville idéale pour le football". Avec les rois David et James en tête de gondole, le nouveau club ne pourrait rêver meilleurs ambassadeurs.
Dans quel stade ? C'était l'une des contreparties exigée par la MLS et le maire de Miami pour permettre à David Beckham de posséder sa franchise : le nouveau propriétaire devra construire un nouveau stade sur des fonds privés, charge à la municipalité de fournir l'emplacement. La réalité est plus nuancée. D'après le Miami Herald, si Beckham and co se sont en effet engagés à ne pas solliciter l'aide des comtés, ils ont en revanche embauché un lobbyiste afin de soutirer quelques subventions publiques à l’État de Floride.
Un projet d'enceinte de 25 000 places est déjà à l'étude. Selon Fox Sports, le nouveau stade pourrait s'ériger près du port de Miami, même si les discussions sont toujours en cours. Seule certitude, les nouveaux propriétaires veulent un stade facilement accessible en transport en commun, et qui ne soit pas situé en périphérie de la ville. "Les fans de soccer aiment se rendre au stade à pied, cela fait partie des traditions", a notamment argumenté Beckham.
L'équipe de foot US universitaire, les Miami Hurricanes, qui peine à remplir le Sun Life Stadium des Miami Dolphins, pourrait également évoluer dans cette enceinte. Enfin, David Beckham et ses associés projettent de construire une académie de football, un centre de formation destiné à fournir des joueurs américains de haut niveau. "On veut aider la sélection, lui donner une chance de gagner, un jour, la Coupe du monde". David Beckham voit grand pour Miami, mais aussi pour le soccer dans son ensemble.
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