Campagne municipale sur fond de règlements de comptes à Asnières-sur-Seine
Le Monde | 01.11.2013 à 14h31 • Mis à jour le 01.11.2013 à 14h45 | Par Eric Nunès
Sébastien Pietrasanta, maire socialiste sortant, repart en campagne. Il est l'auteur d'un hold-up électoral remarqué en 2008. Dans une ville alors ancrée à droite depuis plus d'un demi-siècle, il compose, lors de l'entre-deux tours, une improbable liste d'union allant d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) au centre. Un coup de barre à droite qui se révèle précieux : il boute hors de la mairie l'UMP Manuel Aeschlimann, englué dans une affaire de favoritisme dans l'attribution de marchés publics.
"Le rejet, la haine pour le maire étaient si forts que Pietrasanta est parvenu à cette large alliance. 2014 est la dernière fenêtre de tir pour reprendre la ville. Après elle sera sociologiquement durablement installée à gauche", estime Cyrille Déchenoix, conseiller général UMP, ancien directeur de campagne de M. Aeschlimann et aujourd'hui candidat à la municipale asniéroise.
UNE CAMPAGNE "UN PEU CHAUDE"
Egalement adjoint de M. Aeschlimann lorsqu'il était maire, Cyrille Déchenoix, a vu l'investiture UMP lui échapper, début octobre, au profit de l'ancien édile. Un nouveau coup de frein à son programme de conquête, seulement quelques semaines après qu'il a fait l'objet d'une dénonciation auprès du parquet de Nanterre. Condamné en 2012 à six mois de prison avec sursis pour prise illégale d'intérêt, il est rattrapé par des soupçons portant sur un possible conflit d'intérêts entre ses mandats électoraux et les fonctions qu'il exerce au sein d'une entreprise d'interim. "Les campagnes municipales à Asnières sont toujours un peu chaudes", commente M. Aeschlimann, sourire aux lèvres. Traduction : tous les coups sont permis.
Plus qu'une dissidence locale, la rivalité entre Manuel Aeschlimann et Cyrille Déchenoix cristallise la guerre que se mènent à distance le président du conseil général, Patrick Devedjian, et Nicolas Sarkozy. M. Aeschlimann est un sarkozyste patenté, M. Déchenoix a le soutien de M. Devedjian... Hors de question pour l'ancien président de la République de tourner le dos à l'un de ses derniers fidèles dans les Hauts-de-Seine : "Le 1er octobre, Sarko me déclare qu'il ne sera pas celui qui débranchera Aeschlimann. Quelques heures plus tard, la commission d'investiture de l'UMP le désigne. C'est comme ça !", regrette M. Déchenoix avant d'asséner : "J'irai jusqu'au bout!"
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LA DROITE IRRÉCONCILIABLE
"La droite est à Asnières irréconciliable, se réjouit Sébastien Pietrasanta. Aeschlimann et Déchenoix se vouent une haine mortifère, alors qu'ils ont géré la ville ensemble et demeurent sur un plan politique comme blanc bonnet et bonnet blanc. Ce sont les hommes du passé et du passif. Les responsables de la dette, des emprunts toxiques." Un rapport de la Chambre régionale des comptes d'Ile-de-France, daté de 2007, pointe en effet de nombreuses anomalies dans la gestion de la ville sous la direction de Manuel Aeschlimann. "Un rapport politique, à charge contre ma gestion", se défend-il aujourd'hui.
Baisse de la dette, aménagements urbains, pacification de la vie politique municipale... le maire espère pouvoir s'appuyer sur son bilan pour obtenir un nouveau mandat. Egalement député des Hauts-de-Seine, Sébastien Pietrasanta promet qu'il terminera son mandat local en cas de réélection et d'interdiction de cumul des deux mandats. "Le maire actuel a survendu un changement radical de la politique municipale, mais c'est finalement souvent la même chose que sous l'ancienne mandature : clientélisme, endettement, chasse aux sorcières au sein du personnel communal", cogne Cyrille Déchenoix.
LE CENTRE EN EMBUSCADE
"Il ne pourra y avoir de victoire de la droite que si elle est unie au second tour", avertit le candidat UMP. "En 2008, Pietrasanta a marqué des points en intégrant des personnalités marquées au centre et au centre droit. Il n'a plus ça en magasin", souligne M. Aeschlimann. En effet, l'aile droite de la majorité municipale s'effrite. Après cinq années passées au sein de l'exécutif municipal, Josiane Fischer, ancienne première adjointe au maire socialiste a annoncé, en avril, sa propre candidature sous les couleurs de l'UDI.
La droite étant divisée, Mme Fischer se verrait bien coiffer sur le fil, à l'issue du premier tour, les deux candidats issus de l'UMP qui n'auront eu de cesse de saboter leurs campagnes respectives. Un écueil clairement identifié par l'ancien maire sarkozyste : "Déchenoix pense qu'en me faisant chuter il prendra le leadership de la droite asniéroise. Il se trompe. Si nous sautons tous les deux de l'avion sans parachute, nous nous écraserons tous les deux et quelqu'un d'autre prendra la place", analyse M. Aeschlimann.
Sébastien Pietrasanta, malgré un contexte national où il n'est pas bon de se présenter sous la bannière socialiste s'affiche confiant : "J'ai un bon bilan et deux zigotos en face..."