La verte vallée d’Ossau en Béarn
En hiver comme en été, la Vallée d’Ossau vaut le détour avec son pic du Midi d’Ossau, son petit train d’Artouste, ses vautours, ses bergers gardiens du pastoralisme, ses gaves à truites, ses bonnes tables, ses vins, ses chants polyphoniques et ses chemins de Saint Jacques.
De pics en aiguilles, en prenant ses repères sur le Boulevard des Pyrénées, au cœur de Pau qui vit naître Henri IV, on tisse et cultive en Béarn l’authenticité, l’identité régionale et le sens de la fête qui démarre et se termine toujours par des chants en gascon (cf. Encadré 1). Avec ses musiciens et leurs tambourins, avec ses danseurs aux couleurs vives… Tout est ici prétexte à la fête retrouvée et sans cesse recommencée. Les conversations en béarnais vont bon train, c’est la vie qui se raconte en prenant son temps et la tradition qui se perpétue dans la liesse… Moment de retrouvailles fort coloré lorsque le berger rentre des estives avec ses troupeaux et son fameux fromage. .
Un patrimoine unique et préservé
Là haut, au Pic du Midi d’Ossau, figure emblématique de toute la vallée qui est toujours là où l’on le regarde et que les Ossalois appellent affectueusement Jean-Pierre, le silence n’est distrait que par le vent qui froisse les ailes d’un vautour fauve qui se nourrit d’animaux morts. Le refuge d’Arrémoulit (2305 m) en Vallée d’Ossau, campe dans le Parc National des Pyrénées, site naturel d’une flore et d’un faune d’une rare diversité.
Le petit train d’Artouste, le plus haut d’Europe sans crémaillère, serpente, accroché à la montagne, et permet de rejoindre, au milieu de marmottes peu farouches, le lac d’Artouste (1910 m), de visiter les entrailles du barrage hydraulique du lac géré par la SHEM (Société Hydraulique Electrique du Midi du groupe GDF Suez) qui produit une énergie propre renouvelable et d’appoint… Et d’aller sur les pâturages à la rencontre des bergers au nombre de 120 sur deux cantons (haut et bas Ossau) et qui font désormais la transhumance en famille. Le pastorisme y est bien vivant et séduit les jeunes. On y croise Stéphane, berger depuis 1998, qui nous initie à la fabrication traditionnelle de ses quatre cents fromages produit par son troupeau de 500 brebis et aimerait bien lancer une marque de fromage d’estive. Avant de sortir, avec l’aide ses chiens son troupeau de l’enclos, il nous signale que chaque nom de lieu (71 lieux-dits) correspond ici à un endroit précis pour limiter chaque territoire entre bergers, chiens et brebis. Peuple fier et farouche, les Ossalois défendent aujourd’hui avec passion leurs traditions et leur savoir-faire.
Pour mieux apprécier ce patrimoine pastoral, gastronomique et viticole, il faut imiter le voyageur de Giono qui va « de détour en détour, pour voir le paysage qui est après le tournant ». Sans oublier de goûter sans en abuser ces vins du terroir qu’on ne trouve pas ailleurs que sont le Jurançon, le Pacherenc et le Madiran. Les vignerons du Vic-Bilh ont le sens de l’hospitalité, reçoivent avec l’accent et parlent avec faconde des cépages qui font leur réputation. La garbure et la blanquette d’agneau réconfortent le visiteur en peau de phoque et le pèlerin à sac à dos qui emprunte les deux chemins de Saint Jacques en vallée d’Ossau. A savoir : la voie du Piémont entre Mifaget et Buzy qui vient d’être labellisée en GR 78 et le chemin dit « Voie d’Ossau » datant du XIIe siècle qui depuis Sainte Colombe et sur un axe nord-sud, permet aux pèlerins de rejoindre Sainte-Christine du Somport via le Col des Moines en traversant de part en part la vallée d’Ossau.
Partie intégrante du Béarn, la vallée d’Ossau est annexée à la France en 1620 par Louis XIII, fils de Henri III de Navarre (Henri IV de France). Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, son économie est basée surtout sur l’élevage (vaches et brebis) pour le canton du haut Ossau, et sur l’industrie (tannerie, marbrerie, bois, etc.) pour le canton du bas Ossau. Le thermalisme (Eaux-Bonnes, Eaux-Chaudes) connaît son heure de gloire au XIXe siècle grâce à l’arrivée de l’aristocratie européenne. Au début du XXe siècle, l’hydroélectricité fait son apparition, entraînant avec elle de nouveaux débouchés. A la même époque, le ski se développe à Gourette puis, plus tard, à Artouste.
Aujourd’hui, la vallée d’Ossau essaie de maintenir son activité économique grâce au tourisme, à l’agriculture, et à sa petite industrie. Elle tente ainsi de résister au phénomène de désertification (12 000 habitants au début du siècle, moins de 8000 actuellement dont beaucoup de plus de 50 ans)
« Pas de vautours sans bergers »
Tout près, mais déjà ailleurs. De Rébénacq (alt. 290 m) au Col du Pourtalet (alt. 1794 m), la vallée d’Ossau s’étire sur près de 50 kilomètres. A Aste-Béon, la « Falaise aux vautours » (15000 entrées par an) est un espace muséographique original à régie municipale qui permet d’observer en direct et à l’état sauvage (grâce à des caméras installés près des nids) le Vautours Fauve, un des plus grands rapaces de France qui peut atteindre 2,80 mètres et 7 kilogrammes, et le Percnoptère d’Egypte qui vit en couple isolé sur les falaises. Le maire d’Aste-Béon, Augustin Medevielle est un passionné érudit intarissable sur ces grands oiseaux qui planent dans le ciel environnant et font partie du paysage pyrénéen avec l’aigle royal, l’ours brun, l’isard et la truite fario.
Dans un paysage qui a le charme verdoyant de l’hésitation, non loin du fameux col de l’Aubisque et de la frontière espagnole, on découvre de pittoresques villages, dont les premiers comme des « belvédères », au bout du chemin changeant qui conduit au château d’Espalungue ayant appartenu au mousquetaire Aramis dont on a une belle vue sur Laruns et ses vieilles rues et maisons traditionnelles du XVIe et XVIIe siècles. Son maire Robert Casadebaig (UMP), chef d’entreprise, a choisi le camp des bergers anti-ours au grand dam des écologistes. Dynamique, il pousse de nombreux projets, lutte contre l’immobilisme larvé et les pesanteurs locales en jouant à la fois et dans la mesure des moyens de sa commune rurale la carte du tourisme vert et blanc.
Le « nouveau touriste » en ces temps de mondialisation voyage pour s’imprégner d’authenticité locale. « L’homme moderne a l’impression d’avoir perdu de l’authenticité et va donc la rechercher, déclare Bernard Schéou, enseignant chercheur en tourisme à l’université de Perpignan. Mais l’authenticité n’existe pas, c’est un mythe. Et ce mythe structure la pensée et influence la manière de faire du tourisme ».
En vallée d’Ossau, authentique ou pas, la montagne est propriété des communes ou indivise. Dans ce dernier cas, les syndicats du bas et haut Ossau gèrent les pâturages en fonction de leur potentiel à recevoir le bétail et ont en charge le bon fonctionnement de l’activité pastorale, les accès… Le syndicat est composé d’un conseiller municipal de chaque village.
Bien qu’en perte de vitesse, la langue béarnaise demeure la musique de fond de tous les moments de la vie collective : bistrots, marchés, matchs de rugby, parties de quilles, courses de vaches… Dévaler les sentiers à partir du Col de l’Aubisque à VTT, descendre les canyons, randonner à pied, surfer dans la poudreuse ou s’essayer à la raquette en hiver : on a l’embarras du choix dans la Vallée d’Ossau qui fait partie, avec Aspe et Barétous, des trois principales vallées béarnaises qui s’enfoncent perpendiculairement dans la chaîne pyrénéenne. Un écrin authentique de nature et un petit coin de paradis, loin des Maldives (PP N°35) et des Seychelles envahies par la jet set, qui a su préserver un style de vie pastorale, et son identité avec ses chants et danses. Et de conclure avec Frédéric Beigbeder dans « Un roman français » : « Je me dis souvent : c’est là que j’aurais dû vivre »
CD
Une langue patrimoine pour une identité particulière Le Gascon, trop souvent assimilé à tort à l’Occitan, est une langue à part entière. Elle fait partie des langues romanes. Le Gascon ou Béarnais est né d’une forte latinisation de la vieille langue d’Aquitaine (le Basque actuel en serait proche). Il est la langue officielle du Béarn jusqu’à la Révolution, puis il est interdit au profit du Français. Dès lors, il ne subsiste qu’oralement et disparaît peu à peu. Considéré longtemps comme un simple patois, le Béarnais connaît depuis quelques années un regain d’intérêt, grâce à la création d’écoles associatives, les « calandretas », qui tiennent d’enseigner aux plus jeunes la langue historique en immersion. En dépit de cela, la pérennité du Gascon n’est pas assuré en Béarn. Pour en savoir plus : Sophie Ponsolle « La vallée d’Ossau, Monhélios, 2003 René Arripe « Ossau 1900 », Ed. Loubatières, 1987 |
Encadré 2
Nos Bonnes Adresses L’Aragon Brasserie 18, bld des Pyrénées 64000 Pau. 05 59 27 12 43 L’Arrégalet, restaurant cuisine traditionnelle et gastronomie du terroir de Dolores et Bernard Coudouy. 05 59 05 35 47 Les Bains de Secours, Hôtel restaurant Jean-Pierre Paroix 64260 Sevignac-Myracq. 05 59 05 62 11. Avec un centre de Bien-être bains ferrugineux et hammam sur rv au 06 29 34 21 98 L’Arrajou chambres d’hôtes, Véronique et Hervé Cambier, quartier de l’église 64260 Bilhères en Ossau. 05 59 82 62 38 Le petit train Altiservice Artouste Fabrèges 64440 Laruns 05 59 05 36 99 L’Ecole Ossaloise de VTT, J-Mi Gouadain 06 72 79 39 64 Traqueurs de Vagues, guide de rivières Fred Ballanger 05 59 82 64 32/06 17 55 19 32. Office de tourisme de Laruns Maison de la Vallée d’Ossau 64440 Laruns. 05 59 05 31 41 |