Hadriana dans tous mes rêves
Hadriana dans tous mes rêves Par René Depestre Laissez-vous entraîner par l'érotisme, l'humour et le merveilleux d'un monde où les garçons adultères sont transformés en papillons voleurs de sexe, les mortes paradent en berline et où, si on est attentif le soir à la veillée, on peut même apprendre à créer son propre zombi. |
Écrit en 1988 et récompensé alors par le prix Renaudot, le roman de René Depestre nous invite à redécouvrir une Haïti vibrante et forte de ses traditions, bien éloignée de l'image misérabiliste et abbattue couramment véhiculée dans les médias.Nous sommes à Jacmel en 1938, dans un espace-temps encore intouché par la guerre qui vrombit sur le continent européen, au beau milieu des préparatifs du Carnaval. La petite ville de province est d'autant plus agitée qu'aujourd'hui ont lieu les noces d'Hadriana Siloé, la plus belle et douce jeune fille de la ville. Alors que tous se pressent à l'Eglise pour apercevoir la belle mariée, Hadriana monte les marches de l'autel, prête à lier sa vie au brave Hector Danoze, quand elle tombe raide morte aux pieds du prêtre. Elle est enterrée aux sons nocturnes des tambours vaudous de carnaval qui l'emportent sur les orgues de l'Eglise. Mais, la mort est toute relative au pays des Loas, les dieux vaudous ; le cercueil de la jeune fille est retrouvé vide ! Dans l'Haïti vaudouisante, il n'y a pas de doute possible : la pauvre Hadriana a été zombifiée, vouée à vivre aux marges du monde des vivants, esclave à jamais de celui qui lui a dérobé son âme ; son ti bon zange. Mais, est -ce une vie d'éternelle servitude qui commence pour la jeune fille ou au contraire une chance inattendue d'un nouveau destin?Poète, activiste anti-Duvalier, exilé à Paris puis à Cuba, René Depestre a fait partie des grands combats idéologiques de son temps, militant anti-colonialisme, révolutionnaire cubain, intellectuel de la négritude et de la créolité. Dans ce roman magique-réaliste récompensé par le prix Renaudot en 1988, il nous plonge, au rythme des trompettes vaccines et des danses rabordailles, au cœur des dichotomies toujours actuelles d'une société haïtienne tiraillée entre tradition et modernité, superstitions catholiques et magie, fatalisme et indignation. On se laisse entraîner par l'érotisme, l'humour et le merveilleux d'un monde où les garçons adultères sont transformés en papillons voleurs de sexe, les mortes paradent en berline et où, si on est attentif le soir à la veillée, on peut même apprendre à créer son propre zombi. Ariane Fil
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