There are no translations available. Être ou paraître, sinon devenir… Gil Jouanard Chacun de nous dispose de deux vies, qu’il subit ou conduit séparément, de façon rarement égale, aussi bien en durée qu’en densité. L’une, la plus aisément repérable par un œil extérieur, est purement physique (et principalement physiologique) ; elle concerne sa survie au jour le jour et, par extension, le statut qu’il acquiert plus ou moins tôt, mais aussi les vicissitudes de sa vie affective, familiale et sociale (ou plus précisément socioprofessionnelle). L’autre, mentale, plus intime, plus secrète, n’échappe totalement à l’occultation qu’à condition que notre sujet manifeste une propension à s’exprimer plus ou moins publiquement, si possible avec talent (celui-ci pouvant, dans le meilleur des cas, accéder au stade de l’art). |
There are no translations available. Dans nos gènes se tapit le climat, ce sans-gêne Gil Jouanard Chacun sait que, de la même façon que le permafrost conserve la mémoire d’ères disparues ou que les cercles inscrits au cœur du tronc d’un arbre garde le souvenir de ses âges successifs, l’être humain moderne porte dans ses gênes l’anthologie occultée de son origine et des phases successives de son évolution. There are no translations available. Emploi du temps Gil Jouanard L’Homo Sapiens étant, de tous les animaux, celui qui sait qu’il va mourir, ses chances d’être durablement heureux (comme l’est sans doute le lion en phase de somnolente digestion ou après avoir sailli sa lionne préférée) sont extrêmement minces. There are no translations available. Brumes et brouillards, infusions de poésie Gil Jouanard Nul type d’atmosphère ne produit cette sorte d’effet, que l’on a coutume de dire « poétique », aussi bien et de manière aussi troublante (aux sens physique et psychologique du terme), que celle qui se dégage de la vue d’une ville dans le brouillard ou d’une campagne saisie par la brume. Peintres et cinéastes, de Li Tcheng à Friedrich et de Murnau à Carné ne s’y sont pas trompés : les rochers et les forêts des uns, les marais et les rues des autres, masqués ou voilés, estompés ou vaguement suggérés derrière le tulle qui les élude tout en les dotant de vertus mystérieuses et même magiques, ont toujours suscité des vagues de rêverie et de mélancolie, notoirement propices à l’émergence du sentiment poétique. Et Le Brouillard au pont de Tolbiac, de Léo Malet doit autant à l’évocation de cette « ambiance » atmosphérique qu’aux tribulations du héros, Nestor Burma, et aux avatars de l’intrigue. D’une certaines façon, le maître rêveur éveillé, goûteur de mots et dégustateur d’images, le philosophe à la barbe fleurie, Gaston Bachelard, fut l’orant et le Merlin en même temps que le méticuleux scrutateur de ce phénomène né de la relation coïtale entre la terre, l’eau et l’air. There are no translations available. Réflexes collectifs et conscience individuelle Gil Jouanard
Sortons des réflexes collectifs, laborieusement acquis, pour entrer dans le champ de notre conscience individuelle… Les contextes permanents et les circonstances momentanées qui se combinent pour créer des conditions de vie objectives sont cause du fait qu’aucun parmi les individus qui se font élire (toutes époques confondues) n’aura jamais pu accomplir la moitié du programme ambitieux qu’il avait avancé et qu’il comptait probablement, et honnêtement, réaliser. Son échec, qu’il soit prétendument « de gauche » ou supposé « de droite », est en fait celui des sociétés humaines, trop lourdement lestées de tares collectives et de handicaps de toute nature, pour se tirer d’affaire de façon durable ou même provisoirement satisfaisante. Le trop plein d’Homo Sapiens-Sapiens dont est affectée la part non extensible de terres habitables offerte par notre planète préside à ce fatum d’infaisabilité qui condamne tous les projets, tous les programmes, tous les beaux discours et les bonnes intentions à demeurer lettre morte et vue abstraite de l’esprit. There are no translations available. Ce ne sont que des mots et pourtant… Gil Jouanard Qu’ils lisent pour se distraire, pour penser à autre chose ou pour échapper à la réalité qui les enserre sans ménagement, la plupart des lecteurs de littérature ne songent jamais à lire pour se parcourir eux-mêmes, pour se connaître, pour se reconnaître, pour se découvrir, pour se transformer, pour rejoindre en eux l’inconnu qui se désespère de n’avoir jamais été pris en compte. C’est pourtant ce qu’à leur insu font la plupart. There are no translations available. De la configuration géo climatique au paysage Gil Jouanard
Que la combinaison de la géologie et du climat, données purement objectives, puisse produire un phénomène susceptible de se décliner sous la forme purement subjective de paysage, et venir de la sorte émarger au registre de l’esthétique, c’est un prodige, au demeurant d’ordre purement mental, qui ne cessera d’étonner, tout en le nimbant et l’exhaussant de subtil ravissement, l’esprit attaché au sens des mots et à leur implication culturelle. There are no translations available. Du dépaysement Gil Jouanard De ce nouveau périple effectué de ville en ville dans l’une des parties les plus artistiquement historiques et historiquement artistiques de la péninsule italienne (de Vérone à Bologne en passant par Ferrare et Ravenne), je reviens avec, certes, quantité d’émotions artistiques, spirituelles et intellectuelles, ainsi qu’avec une cargaison d’anecdotes piquantes ou agaçantes. Mais avec aussi le très complexe sentiment et la sensation concrète qu’une leçon peut être tirée de l’expérience. There are no translations available. Attention, un regard peut en cacher cent autres Gil Jouanard La ville, ou du moins celle qui a de la « bouteille », qui a déjà beaucoup vécu, celle dont la mémoire déborde de toute part, est un palimpseste. Celui qui y circule à la façon du Wanderer romantique, les yeux grands ouverts, l’attention en alerte et le pas accordé au tempo mesuré de la promenade exploratrice, celui-là sera à la fois le continuateur et l’héritier de cet « être » humain tout juste sorti de l’engourdissement paléolithique et livré aux assauts de sa curiosité, au travail souterrain de sa vigilance, aux intuitions de son imaginaire encore chargé de cette énergie qui l’a progressivement sorti de son animalité végétative. There are no translations available. Apprendre à voir Gil Jouanard Dans celui qui me paraît être le plus riche de significations et d’implications de ses livres, Rainer Maria Rilke, écrivain austro-tchèque, puisque à la fois de culture germanique et de sensibilité pragoise, mais d’une certaine façon aussi français par la fascination qu’exerça sur lui le Paris de la fin du XIXe siècle et du début du XXe, Rilke donc nous livre deux règles impératives de vie, pour quiconque aspire à connaître le réel et, simultanément, à le vivre de l’intérieur et à l’exprimer (ainsi que s’efforce de le faire tout écrivain). There are no translations available. Continuons avec des notions que, faute de pincettes, nous prendrons avec un marteau de forgeron ou… une framée (Mais «forgeron» vient du latin « faber », dont l’équivalent grec est «poegn», verbe d’action par excellence, qui, étrangement, servit à bâtir le mot «poésie») Gil Jouanard Le seul critère d’ « appartenance identitaire» que je suis enclin à revendiquer concerne non pas un pays, une nation ou un peuple, mais une mosaïque de lieux, répartis à travers le monde, et d’œuvres géniales (dont les auteurs peuvent, le cas échéant, fort bien me laisser personnellement indifférent ou même m’insupporter, comme c’est le cas par exemple de l’insupportable adolescent et adulte traficoteur Rimbaud ou de l’abject antisémite Céline). Ainsi n’ai-je jamais été susceptible de me « sentir » Français à temps plein, quoique m’estimant avec volupté citoyen de la langue française et compatriote admiratif de quelques poètes de cette langue et de quelques artistes ayant disposé ou disposant, par hasard, de la « nationalité française ». Mais, à partir de cette même logique, je pourrais aussi bien me dire Allemand ou Italien, pour les mêmes raisons, ou encore Roumain et Irlandais pour quelques uns des « paysages » constitutifs des territoires habités et animés par ces « ressortissants ». |
|