Patricia Martinez
Photographe de la vie couleur café
"On ne peut aimer que si l'on est ivre de vie » (Tahar Ben Jelloun)
Elle a le sourire rare, un visage grave. Elle aime le tango et le chante divinement. Elle aime les mots et jongle avec, délicieusement. Elle a un cœur de maman gros comme ça et en plus, elle aime la photographie : c’est une croqueuse de la vie à vif particulièrement douée. Et moi, j’aime Patricia Martinez que j’appelle Ozita, Oz étant son pseudonyme de photographe. Notre rencontre virtuelle via Myspace, date voici maintenant de quelques 4 ou 5 années. Le dialogue s’est poursuivi via Facebook. Et puis, il y a eu la rencontre réelle à Nîmes, en juin dernier …
Elle m’attendait à la gare de Nîmes. Je l’ai vu venir vers moi derrière ses grosses lunettes noires de star, avec son bandana violet, son pantalon baggys et ses baskets. Une vraie nana hip hop¹ ! Je vais découvrir au cours de la soirée combien cette culture compte pour Patricia :
« Le hip hop prône la paix. C’est le respect de l’autre, du pluriracial, l'unité des peuples … »
Nous évoquons à peine le reportage sur elle pour Nananews.fr que je suis venue faire. Nous avons tant à échanger que l’interview classique est aux oubliettes. Cependant, j’enregistre dans mon cœur ces moments précieux, subjuguée par l’immense compassion qui dévore son regard.
Patricia me parle de sa passion née assez récemment – trois ans tout au plus - pour la photographie :
« Juste une autre façon de partager et d'échanger... Un jour je me suis mise à voir et depuis je vais où mon regard me porte et non mes pas... »
L’art, Patricia Martinez est tombée dedans toute petite. Elle commence par la danse qui devient l’expression de son ardence. Et puis s’ajoutera la chorégraphie, tant elle a besoin d’exprimer mille et une émotions. Mais une blessure met fin à sa carrière sur les planches.
Etant parfaitement bilingue, avec le groupe Amanecer (Lever du Jour) elle enregistre quelques chansons en français et en espagnol. Une voix à la fois mutine et sensuelle.
Je craque particulièrement pour « Presuncion » que l’on peut écouter sur son site Myspace.
(http://fr.myspace.com/music/player?sid=64940950&ac=now
http://fr.myspace.com/cuandoamanesca)
- La rue est son théâtre.-
Oui, ce qui retient mon attention, c’est le regard de Patricia Martinez, profond, une chambre noire où se développent les images qui la bousculent, l’émeuvent, la hantent. Il y passe un reflet de mélancolie. Son regard semble avoir accompagné bien des souffrances. Dans une autre vie, une de ses multiples vies, Patricia est aide soignante au CHU de Nîmes. Un univers où l’on ne côtoie pas la légèreté tous les jours alors quand elle retrouve la rue et sa débauche de vitalité, elle devient gourmande voire affamée et elle enchaîne les « clics » avec son inséparable Canon 500D numérique.
Le miracle est au rendez-vous, à chaque fois. De la chance ? Non, c’est ce qu’on appelle le talent :
« C’est vrai, je suis autodidacte dans ce domaine mais je travaille dur pour maitriser la technique qui donne la liberté d’action. Je ne sais pas si j'ai du talent, mais je me dis que si dans mes photos l'émotion est omniprésente, si une poignée de personne s'arrête sur mon travail et voit à quel point j'aime chacun de ces visages connus ou inconnus et bien j'en suis la plus heureuse. J’aime penser que l'émotion qui circule soit un lien qui unisse les individus entre eux.
Quand j’ai dû arrêter la danse, ça a été un coup terrible. Il me fallait renouer avec de nouvelles sensations. C’est alors que j’ai commencé à prendre des photos… avec mon téléphone portable ! Jusqu’au jour où une amie m’a mis ce bijou entre les mains et depuis nous sommes inséparables, mon Canon et moi. »
Sans titre ©Oz
Outre le Street art et le graffiti qui la passionnent, Patricia ose tous les genres photographiques. Il faut avoir vu ces portraits le plus souvent en noir et blanc, ces Monsieur ou Madame Tout le monde qu’elle ramène dans son boitier. Il y a vraiment une grâce qui transcende ces captures de vie ! Les visages, les silhouettes mais aussi les objets, les rues, les murs, les façades… Tout prend une dimension spéciale sous le regard aigu de la jeune femme. Tout devient diablement intéressant. Et on se dit qu’on n’aurait jamais eu l’idée de photographier tel ou tel sujet. Mais, n’est-elle pas une magicienne qui transcende tout ce qu’elle regarde ?
Auto portrait d’Oz (alias Patricia Martinez)
- Photographier en corps à corps -
Ce qui fait la particularité des photographies de Patricia Martinez (Oz), c’est son corps à corps avec ses sujets. Elle opère au plus près de l’action, de la sueur, de l’émotion. L’univers du hip hop a trouvé en elle sa meilleure interprète. Elle suit de près les danseurs mais pas seulement sur scène, elle est avec eux dans les coulisses, lors de leur préparation, et après aussi, quand la pression a cessé, que tout se relâche, car c’est dans une fraction de seconde volée qu’elle va traquer le miracle et obtenir la photo géniale, l’excellence.
L’évènement pour Patricia cette année, aura été la manifestation Battle of the Year dans les arènes de Nîmes début juillet, qu’elle a suivie de bout en bout avec son Canon et son regard qui ne laisse rien échapper. Les chorégraphies hip hop n’ont aucun secret pour elle et c’est avec audace et une énergie incroyable qu’elle a cadré ses prises de vue, n’hésitant pas à adopter des positions extrêmes pour avoir le meilleur angle. Toujours au plus près de l’événement, c’est sa ligne de conduite.
« C’est seulement ainsi que je peux capturer le cœur du vrai ! »
Patricia en action
L’édition 2012 de Battle of the Year France a rempli son contrat. La foule des spectateurs (plus de 6000 personnes) a été comblée par des chorégraphies bien huilées, des battles exceptionnels, d'un très haut niveau, des vrilles, des freeze, des nineteen, des coupoles. Chaque crew (équipe) a donné le meilleur pour offrir du vrai spectacle. Patricia, bien sûr, était aux premières loges avec son appareil photo ! Les artistes qui ont pu voir les résultats se sont émerveillés de ces instants vérités saisis par leur photographe préférée, toujours dans la plus parfaite humilité, sans jamais rien exiger ni signature, ni rétribution ! Juste pour le panache !
Shao the boy©Oz
Répétition pour Battle of the Year©Oz
La photo de Patricia a été sélectionnée pour la Battle of the year France 2012 : une belle campagne d’affichage !
¹ Le hip-hop est un mouvement culturel et artistique apparu aux USA, New-York( dans le Bronx Sud) au début des seventies. Originaire des ghettos noirs et latinos de New York, il se répandra rapidement dans l'ensemble du pays puis au monde entier au point de devenir une culture urbaine importante. La culture hip hop connaît plusieurs disciplines : le rap (ou MCing), le DJing, le break dancing (ou b-boying), le graffiti, le beatboxing. Ces disciplines, apparues avant le hip hop, seront intégrées dès la naissance du mouvement. C'est néanmoins par son expression musicale qu'il est le plus connu et, de ce fait, souvent réduit à celle-ci.
Cette expression musicale est elle-même souvent appelée tout entière rap, ce qui est là aussi un raccourci dans la mesure où ce terme ne s'applique qu'à la parole, scandée et saccadée, propre au MCing. La musique hip hop peut en effet revêtir plusieurs formes : ou bien se limiter aux seuls beats du DJ, auquel cas le terme de rap ne convient pas. Le terme rap, et encore moins le terme hip hop, ne peut s'appliquer au slam. Le slam n'ayant aucun rapport de près ou de loin avec le hip hop. (Source Wikipédia)
Déclaration de paix du Hip hop du 16 mai 2001 : « Cette Déclaration de paix du hip hop guide la culture hip hop de la violence à la liberté, et établit conseils et protection pour l'existence et le développement de la communauté internationale hip hop. À travers les principes de cette Déclaration de paix du hip hop, nous, la culture hip hop, sommes une fondation de santé, d'amour, de conscience, de richesse, de paix et de prospérité pour nous-mêmes, nos enfants et leurs petits-enfants, pour toujours. Pour la clarification du sens et de l'objet du hip hop, ou lorsque l'intention du hip hop est remise en question, ou lorsque surviennent des différends entre les parties concernant le hip hop; les hip hoppers ont accès aux conseils de ce document, la Déclaration de paix du hip hop, comme orientation, conseil et protection. » http://www.declaration-of-peace.com/fr/
A Consulter :
http://www.flickr.com/photos/lerefs/
http://issuu.com/shootingmagazine/docs/shootingmag25
https://www.facebook.com/patricia.martinez.733076
https://www.facebook.com/pages/Patricia-Martinez-Aka-Oz/304054959623308?sk=info
En prime, pour lui souhaiter un heureux anniversaire, cette photo souvenir, cliché très rare d’une Patricia Martinez qui sourit. L’auteur de cette photographie n’est autre que le cinéaste Jean-Pierre Lledo !
Et ces vers de Brel qu’elle aime particulièrement :
"Je vous souhaite des rêves à n'en plus finir
et l'envie furieuse d'en réaliser quelques-uns.
Je vous souhaite d'aimer ce qu'il faut aimer
et d'oublier ce qu'il faut oublier.
Je vous souhaite des silences.
Je vous souhaite des chants d'oiseaux au réveil
et des rires d'enfants.
Je vous souhaite de résister à l'enlisement, à l'indifférence,
aux vertus négatives de notre époque.
Je vous souhaite surtout d'être vous."
©Mahia Alonso