Renault se serre la ceinture, mais pas son patron
Par Christine Lesueur
La crise frappe le constructeur automobile qui lutte contre les plans sociaux mais Carlos Ghosn n'entend pas baisser son salaire annuel de 13 millions d'euros.
Axel de Tarlé. Europe1
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Auto : les immatriculations en chute libre
Pour le mois de janvier, la dégringolade est de - 15%, et les prévisions sont sinistres.
Le bilan. Le marché français de l'automobile prend la route d’une nouvelle année noire. Vendredi matin, le Comité des constructeurs français d'automobile a confirmé que les immatriculations en France avaient encore baissé de 15% en janvier par rapport à décembre, un chiffre révélé par Europe 1, après une baisse de 14% déjà enregistrée sur l'ensemble de 2012. Et cela devrait se poursuivre, puisque les constructeurs annoncent une nouvelle année de repli, aux alentours de 5%. Une déconvenue qui signifierait deux années de baisse consécutives et un volume annuel de 1,8 millions voiture vendues… soit le niveau le plus bas depuis 1997.
• Les Français n'achètent plus français. Et ce n'est pas ça le plus inquiétant pour Renault, Peugeot et Citroën. Fait inédit : si les tristes prévisions des constructeurs devaient se concrétiser, les marques tricolores représenteraient moins de 50% du marché… alors qu'elles pesaient encore 75% en 1980. Et les chiffres de janvier 2013 ont plus que tendance à leur donner raison : les ventes ont chuté de 12 % pour Renault, 16,7 % pour PSA… Seules trois marques tirent leur épingle du jeu : Dacia, la marque "low-cost" de Renault, dont les ventes ont grimpé de 7 %, Lexus, la marque haut-de-gamme de Toyota (+24 %) et le Coréen Hyundai, dont les ventes ont augmenté de 42 %.
Les constructeurs affinent leur stratégie. Renault commence quand même à limiter la glissade grâce à l'arrivée de la Clio IV, assure-t-on du côté de la marque au losange. Citroën, de son côté, revoit sa stratégie : la marque aux chevrons va désormais sortir des modèles à petit prix pour occuper le terrain du low cost laissé à Dacia. La montée en gamme vers le luxe sera confiée à la ligne DS, qui va prendre de plus en plus ses distances avec Citroën pour devenir une marque à part entière.
Le plan Montebourg peut-il changer la donne? Rappelez-vous, c'était le 25 juillet dernier. Arnaud Montebourg annonçait un plan destiné à être rien de moins que "le moyen d'une renaissance de l'automobile en France". Sa mesure phare : l'instauration d'un bonus-malus automobile, qui est entré justement en vigueur début janvier. Le bonus est ainsi passé à 7.000 euros pour les véhicules électriques, et à 4.000 euros pour les hybrides, ce qui est censé favoriser les marques françaises, en pointe en la matière.
Le hic? "L'augmentation du malus va, en revanche, nuire au 'made in France' ", comme l'analysait début janvier pour Europe1 Laurent Meillaud. Et de poursuivre : "il va toucher les breaks, les monospaces. En tout, un cinquième des Français va payer un malus. Cette mesure va avoir un effet plus néfaste qu'escompté." Le malus se déclenche à partir d'un taux d'émission de CO2 de 135 grammes par kilomètre et les tranches voient leur taxation s'alourdir de 50 % à 167 %. Les acheteurs des véhicules les plus polluants (plus de 200 g/km) devront s'acquitter, eux, d'un malus de 6.000 euros.
Ne l'appelez plus "taxe à 75%"
Pierre Moscovici a confirmé la préparation d'une taxe du "même esprit". Mais à quel taux ?
Le calendrier. Encore "deux à trois semaines " de suspense. C'est le délai que s'est donné le gouvernement, avant de dévoiler son projet, revu et corrigé, de taxe sur les très hauts revenus. Europe 1 avait révélé fin janvier que ce projet, dans sa première mouture, était bel et bien enterré. "Dans les deux à trois semaines qui viennent, vous saurez ce qu'est la position du gouvernement, au plus tard d'ici la fin février", a en effet promis Pierre Moscovici, dimanche sur France 2. Selon les informations d'Europe1, Bercy et Matignon travaillent de concert au nouveau texte, mais rien ne serait encore tranché à l'heure actuelle.
Le défi à relever. La future mesure aura "le même esprit" que la précédente, qui prévoyait de taxer 75% des revenus dépassant le million d'euros, a précisé le ministre de l'Economie. Mais elle sera "conforme aux principes énoncés par" les Sages du Conseil constitutionnel, s'est il empressé de préciser. "Il est logique que dans un pays qui fait des efforts, et beaucoup de Français font des efforts, ceux qui gagnent beaucoup d'argent fassent un effort exceptionnel pendant une durée exceptionnelle", a développé le patron de Bercy. Et de préciser dans la foulée: "je ne veux pas risquer une nouvelle censure et je veux rester près des principes qui ont été définis par le Conseil constitutionnel".
75% ou presque... Une chose est fixée : il s'agira d'imposer les très hauts revenus, de manière temporaire, tout comme le prévoyait la précédente taxe. Mais contrairement à cette dernière, la future mesure devrait concerner le foyer fiscal tout entier et non une seule personne. Elle sera "conjugalisée", dans le langage du fisc. Selon nos informations, son taux devrait par ailleurs tourner autour de 67%.
Eviter la censure à tout prix. Rien ne sera être laissé au hasard. Si la mesure est conjugalisée, c'est précisément pour ne pas s'exposer une nouvelle fois à la censure des sages. Ceux-ci l'avaient en effet rejetée fin décembre parce qu'elle portait sur les revenus d'une personne et non d'un foyer, ce qui l'a rendait inégalitaire : un foyer dans lequel deux personnes gagnent 900.000 euros chacun aurait été épargné, mais un ménage où seulement une personne gagne plus d'un million aurait été taxé, même si la deuxième ne gagne rien du tout. De même, le taux de la future taxe ne sera pas à 75%, pour éviter d'être jugé confiscatoire. Ultime précaution : le gouvernement soumettra le projet au Conseil d'Etat, afin d'éviter un nouveau rejet.
Quel seuil d'entrée? La précédente taxe concernait les revenus supérieurs à un millions d'euros. Or, si la future mesure devait s'appliquer non plus à une personne mais à un foyer entier gagnant une telle somme, le nombre de contribuables concernés passerait de 2.000 à 15.000. De quoi rendre la mesure encore plus impopulaire. Pour éviter cela, le gouvernement envisage de relever le seuil à 1,5 million d'euros de revenus, mais rien n'est encore tranché. Seule certitude : Bercy et Matignon souhaite qu'elle rapporte autant que prévu par la taxe à 75%, soit entre 200 et 250 millions d'euros.
Dévoilé en février mais voté quand? Si le dispositif pourrait être détaillé d'ici un mois, qu'en sera-t-il du vote? Le 25 janvier dernier, le ministre des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies, assurait que le futur texte trouvera "sa place dans la prochaine loi de finances rectificative au mois d'avril ou au mois de mai". Selon nos informations toutefois, le gouvernement voudrait l'inclure dans la prochaine loi de finances, qui sera élaborée et votée à l'automne prochain. Quoi qu'il en soit, selon l'un de ses proches contacté par Europe1, François Hollande a jugé qu'il était "politiquement impossible" de renoncer à cette promesse de campagne.
La France est-elle en faillite ?
Recherche web Christine Lesueur
Source : sfr info – Europe1