Éditorial - 15 octobre 2011
ARNAUD MONTEBOURG:
LE BEAU GOSSE DE LA RÉPUBLIQUE
Séducteur, intelligent, un rien sarcastique et arrogant, pourvu d'une de ces belles gueules dont les femmes raffolent et dont il sait user, ne ménageant « ni le chou ni la chèvre » il a depuis des années bousculé ceux qu'il avait surnommé les « éléphants » leur reprochant un immobilisme grégaire qui d'une part les tenait à l'écart des actions à mener pour le bien de la société et des hommes, et d'autre part les maintenait dans des schémas idéologiques périmés dont ils ne parvenaient à moduler ni les règles, ni les dogmes, ni les discours dont ils abreuvaient des partisans de plus en plus éloignés et qui pourtant les avaient portés au pouvoir en 1981, convaincus qu'enfin la gauche, cette gauche née des révolutions russes saurait rétablir plus d'égalité et plus de justice sociale. Qu'elle saurait développer l'économie, l'éducation, les ressources, enfin la solidarité et le civisme.
Mais le pouvoir corrompt c'est bien connu, et ces « éléphants » éblouis par leurs nouvelles fonctions ont trempé dans des scandales financiers et des détournements d'argent, dans des délits d'initiés et tellement d'abus et de profits divers qu'il a fallu que Mitterrand les amnistie, histoire de remettre les hommes à l'heure.
Hélas, quand on a croqué la pomme, qu'on lui a trouvé du goût, dur dur de revenir en arrière, de s'intéresser à d'autres qu'à soi et son petit monde merveilleux dans lequel on tourne en rond entre amis.
Je me souviens de m'être trouvée un 1e décembre dans un gala organisé par Pierre Berger. À ma table Douste-Blazy, Alain Minc, Willy Rozenbaum. Je vous assure que leurs discours étaient exactement semblables. Le sida qui concernait cette soirée n'était pas au centre de leurs propos, seulement les affaires, l'argent et le luxe. Jacques Lang particulièrement avait la nostalgie des fastes et des honneurs « du bon temps où ils étaient reçus par le gouvernement Russe avec champagne, caviar, et qui pour eux seuls ouvrait le Bolchoï. Quel bonheur alors ces réceptions et ces invitations ... »
Eh oui, les choses avaient changé, mais pas les hommes. Ceux qui furent de cette génération, ivres de gloire et de pouvoir ont fait très attention à ne pas laisser des gens plus jeunes et novateurs, plein d'enthousiasme et de volonté de bien faire, prendre du poids dans ce PS qui n'en était plus un.
Aujourd'hui malgré leurs échecs successifs aux élections présidentielles, constamment dues à leur distance d'avec le terrain et le peuple d'en bas, ils persistent et continuent d'évincer ces nouveaux réformateurs qui les bouteraient à jamais hors des hémicycles décisionnaires.
Cela rappelle étrangement l'opposition Michel Rocard et François Mitterrand. La France entière souhaitait Rocard, mais les mazarins du parti, lui substituèrent F.Mitterrand. C'est ainsi que Rocard passa à côté d'un plus grand destin que celui qui ensuite lui fut dévolu et que la France devint celle des écoutes et de FrançAfrique.
L'histoire se répète donc à l'infini. Que ce soit Aubry avec ses flous et ses délires de barrages aux frontières par blocus sur les pays forts, alors que ayant tellement besoin d'eux et eux si peu de nous, nous n'avons aucune possibilité de pression, ou Hollande plus évasif encore sur sa responsabilité dans l'immobilisme du PS de novembre 97 au 26 novembre 2008, ce sera de toutes les façons un professionnel du consensus et de l'approximation qui dirigera la France si le PS gagne les présidentielles de 2012. Ce qui ne présage rien de bon pour l'avenir économique, social et humain des Français.
Et pourtant, il aurait suffi que cette gauche dinosaurienne des éléphants, accepte le nouveau courant « NPS » qui surgissait porté par Vincent Peillon, Julien Dray, Benoit Hamon et Arnaud Montebourg pour que peut-être et même sûrement, le PS retrouve son sens profond et humaniste, s'adapte aux nouvelles données de l'évolution et participe pleinement à la marche en avant, toujours périlleuse, d'un monde en mutation constante.
Il n'en a pas été ainsi et même si Arnaud Montebourg brigue un poste de ministre dans un futur gouvernement de gauche, il n'aura pas les mains libres, ni la parole, et la mondialisation modérée qu'il préconise n'aura pas lieu, entre autres innovations qu'il aurait pu mettre en place.
Alors pour rendre à Arnaud Montebourg ce qui lui appartient et qu'il faut saluer réellement, c'est qu'il n'est pas seulement beau gosse le Roméo de Solférino, il est avant tout un républicain. Un vrai avec des convictions et des valeurs qu'il porte sans jamais s'en écarter. Ni par les actes ni par les mots. Quoi qu'il lui en coûte et ça lui a coûté. Lorsqu'on lui parle sémantique, bannières et autres PS, il regimbe, se rebiffe, se démarque du fatras des mots redondants et parle de laïcité et des valeurs qui fondèrent notre République.
Et franchement, c'est vraiment de cela qu'il s'agit, cela que les Français réclament : de la fraternité, de la solidarité, de l'égalité. Et ces valeurs-là n'appartiennent ni à la gauche ni à la droite, elles appartiennent à ceux qui les font vivre.
Si notre beau gosse de la République ne joue pas trop à DSK, dont il a la brillance et certaines des manières, nous aurons toutes les chances en 2017 d'avoir enfin un républicain en République.
Louise Gaggini