Puissiez-vous vivre des temps intéressants!
Cette malédiction chinoise, il semblerait que nous soyons en train de la vivre. La situation des pays européens n'est pas reluisante: crise économique dont nous ne voyons pas la fin, montée des extrémismes politiques, crise identitaire, tolérance envers la violence politique, appel à la «révolution». Sommes nous assez fous pour revenir en arrière? Avons nous déjà oublié que la violence verbale dans le discours politique amène immanquablement à la violence tout court?
Nous n'en sommes pas encore là, mais tous les ingrédients sont réunis pour que la «cocotte minute» explose. Et nous allons devoir nous accommoder de ce terreau, notamment le manque de perspective économique, pendant un bon bout de temps. A moins d'une guerre avec l'Iran, d'ailleurs vous avez remarqué comme c'est silencieux sur ce front? c'est dans ces moments là qu'il faut se méfier.
Mais pour en revenir à notre situation, avant de se méfier de nos dirigeants, nous ferions bien de nous méfier de nous mêmes. Nous méfier de nos explosions de colère, de notre propension «naturelle» à chercher des bouc-émissaires: les juifs, les arabes, les immigrés, les gauchistes, les sarkozystes, les homos qui veulent se marier et les banquiers cocaïnés.
La France d'aujourd'hui n'est plus celle des années 30; l'Etat n'est plus fédérateur, la population n'est plus aussi homogène. Par bien des côtés, la «République indivisible» n'est plus, il y a à la place une multitude de groupes qui se définissent de plus en plus en contre. Une montée du niveau de la violence ressemblerait plus à une lutte de tous contre tous qu'à un choc des nations. Et par la force des choses, la réponse étatique serait elle aussi brutale.
Alors même que nous devons déjà faire des efforts pour joindre les deux bouts, il nous faut fournir un effort supplémentaire pour ne pas sombrer dans des pratiques anti-démocratiques. Le dégout des citoyens envers les professionnels de la politique qui nous gouvernent s'est étendu à la chose politique elle même. Or investir le champ politique est la seule alternative à la violence. Dit autrement, nous n'avons pas le choix ; si nous voulons à moyen terme sortir des impasses économiques et sociales dans lesquelles des décennies de «politique-business» nous ont enferrées, il nous faut nous réapproprier le politique, notamment au niveau local.
Il nous faut au minimum ne rien céder aux discours extrémistes et violents, d'où qu'il viennent. Car pour le coup nous pourrions vraiment vivre des temps intéressants.
Lucie