Semaine shakespearienne pour François Hollande
Par Christian Duteil
Où la rentrée s’annonce fort mal pour le Président de la République, maltraité par la conjoncture, les plans sociaux, l’absence de croissance et les sondages. La barre symbolique des 3 millions de chômeurs serait franchie. Et où celui qu’un méchant persifleur vient de baptiser « l’Hamlet élyséen » a un moment d’abandon et un grand sentiment de solitude… Solitude du pouvoir alors qu’il vient de s’exiler à New-York pour discourir devant l’assemblée des Nations Unies.
Alors, pour tenter de vaincre la dépression, tuer le temps et prendre de la hauteur, François relit ses classiques, notamment Shakespeare, le monologue d’Hamlet, traduction André Gide.
Etre ou ne pas être président : telle est la question. Y-a-t-il pour l’âme plus de noblesse à endurer les coups et les revers d’une injurieuse fortune, ou à s’armer contre elle pour mettre frein à une armée de douleurs ? Se soumettre, se démettre : est-ce tout ? Ah ! calmer dans la retraite les affreux battements du cœur ! Inaugurer des Chrysanthèmes : quelle conclusion des maux de l’homme d’Etat serait plus dévotement souhaitée ? Se soumettre, se démettre… ou rêver, peut-être.
Rêver, c’est là le hic ! Car si, dans le sommeil de la raison, il nous vient des songes de triomphe… halte là ! Et pourtant qui supporterait sans cela les calamités de la vie publique, les soufflets et les avanies, les affres de la passion dédaignée que l’on porte à son peuple, les rebuffades de ceux dont on aimerait être aimé, la suffisance des gens officiels, les outrages d’un orgueilleux qu’on a trop caressé, alors qu’une petite signature au bas d’une abdication viendrait à bout de tout cela ? Qui donc assumerait ces charges, accepterait de geindre et de suer sous le faix écrasant du pouvoir, s’il n’y avait cette crainte de la mort politique, mystérieuse et ennuyeuse contrée d’où nul voyageur ne revient ? Voici la peur qui nous engage à supporter les maux présents, plutôt que de nous en échapper vers ces autres que les traversées du désert nous ont fait connaître.
Et c’est la conscience de tout cela qui fait de chacun de nous un couard ; c’est ainsi que la verdeur première de nos résolutions s’étiole à l’ombre pâle de la pensée ; c’est ainsi que nos entreprises de grand essor s’enlisent dans le marais des occasions perdues, des échéances chaque jour reportées, des affaires immenses jamais terminées, du combat sans fin avec l’ange du désordre et du bâclé, avec les démons de la bureaucratie et du collectivisme. Amen !
C.D