Wassyla Tamzali : Une femme, une écrivaine, une militante
Née en Algérie en 1941, elle a exercé de 1966 à 1977 le métier d’avocat à la Cour d’Alger et mené parallèlement des activités journalistiques et culturelles. Rédactrice en chef du premier hebdomadaire maghrébin libre «Contact» (1970-1973), elle est auteur d’un livre (1975) sur le cinéma maghrébin qui est un plaidoyer pour la liberté d’expression « En attendant Omar Guetlato », et un ouvrage d’art sur la parure des femmes berbères ‘’Abzim’’, un hommage à la créativité des femmes de son pays (1986).
En 1979, elle rejoint la fonction publique internationale à l’UNESCO où elle est chargée du programme sur les violations des droits des femmes au sein de la division des Droits de l’Homme et de la Paix, et entre autres questions, des dossiers sur l’égalité en droit des femmes et des hommes et de la violence contre les femmes – Son rôle dans la lutte des femmes originaires des pays de culture islamique, ainsi que dans la lutte contre la prostitution et le trafic des femmes est reconnue tant par le monde associatif que par les décideurs.
En 1989 elle rejoint le Front des Forces Socialistes et occupe des fonctions dans les instances dirigeantes de ce parti.
En 1991, dans le cadre de la préparation de la 4ème Conférence mondiale des femmes des Nations unies de Beijing, elle organise la participation de l’UNESCO au Forum des ONG’s de cette conférence. Elle conduit les activités portant sur la lutte contre l’exploitation sexuelle des femmes, le Parlement des Femmes dans les pays islamiques, les violences contre les femmes algériennes dans le cadre de la guerre civile que connaît le pays…
En 1992, elle est membre fondateur du Collectif Maghreb Egalité.
Dès 1992, elle participe au mouvement des femmes balkaniques pour la paix et le respect des différentes cultures dans la région – Elle apporte son appui et son aide à toutes les initiatives entreprises par l’Association interbalkaniques des femmes pour la paix, et contribue à l’ouverture du Centre UNESCO pour les ‘’Femmes pour la Paix’’ dans les Balkans à Thessaloniki (Grèce). En 1995, elle est chargée de rédiger le rapport de l’UNESCO sur « le viol comme arme de guerre, eu égard à la situation en Bosnie-Herzégovine», qui a été présenté à la 4ème Conférence Mondiale des Femmes à Beijing, et elle entreprend dans ce pays de nombreuses missions pour le respect de la pluralité culturelle, l’aide aux victimes et la lutte pour les reconnaissances et le respect des droits de l’homme.
En 1996, elle est nommée Directrice du Programme de l’UNESCO pour la Promotion de la condition des femmes de la Méditerranée. A ce titre, elle engage de nombreuses activités concernant l’égalité et la participation des femmes des pays du sud. La coopération transméditerranéenne au bénéfice des femmes est l’axe principal de ce programme. Elle crée ainsi le Forum des Femmes de la Méditerranée, le Festival de Thessalonique ‘’Femmes créatrices deux mers : la mer Noire et la mer Méditerranée’’, le Réseau des Villes «Les Plazzas Méditerranéennes pour les femmes et la Paix» (l’organisation de concours d’architecture ouverts aux femmes), et elle lance un programme interuniversitaire sur l’histoire méditerranéenne des femmes : ‘’Les transversales : Histoire et histoires des femmes de la Méditerranée’’.
Aujourd’hui, elle partage son temps entre l’écriture et les actions militantes au sein du mouvement féministe maghrébin et pour un dialogue entre les peuples de la Méditerranée.
A retenir :
Intervention de Wassilya Tamzali lors de l'ouverture du Colloque international sur le "Genre Résistance et Négociation "
organisé par l'université "Mouloud Mammeri" de Tizi-ouzou
http://conferencegender.e-monsite.com
« En Algérie on a compris que l’histoire des femmes, c’est l’histoire de la société. »
« Une femme en colère, lettre d’Alger aux Européens désabusés » (Gallimard, 2009)
Son livre dénonce : « La liberté de conscience n’existe pas ! »
4e de couverture : « Wassyla Tamzali, interpelle les intellectuels occidentaux qui se sont battus pour l’universalité des droits de la personne humaine, et se montre aujourd’hui incapables de penser cette universalité au-delà de l’Europe. Eux qui ont défendu les principes démocratiques fondamentaux dans leur pays, eux qui ont milité pour la décolonisation, auraient-ils oublié leurs combats ? « Une femme en colère, lettre d’Alger aux Européens désabusés » met en lumière le renoncement de la pensée européenne devant la montée en puissance des groupes communautaires. En prenant pour un indice de la condition des femmes, la liberté de conscience ou la diversité culturelle, l’auteur passe au crible les idées de tolérance, de « laïcité ouverte », d’ « islam modéré », de « droit à la culture » et leurs conséquences politiques dans les pays arabes et musulmans. »
Wassilya Tamzali a publié en 2007, aux éditions Gallimard « Une éducation algérienne ».
Quelle place pour les femmes dans les pays Arabes ?
(Article publié dans Le Glob, blog des médiathèques d’Anthony
(http://leglob.viabloga.com/news/quelle-place-pour-les-femmes-dans-les-revolutions-arabes)
Café société avec Wassyla Tamzali, auteur de « Une femme en colère »
Lors du Café société du 19 novembre (2011) dans le cadre de notre cycle « Zoom sur le monde arabe », Wassyla Tamzali s’est exprimée de manière très engagée sur la condition féminine dans « les pays des révolutions arabes ». Elle a aussi fait un exposé brillant sur les différentes étapes des révolutions arabes.
Wassyla Tamzali fut avocate à Alger pendant dix ans, puis à partir de 1980, pendant vingt ans, elle a dirigé le programme sur la condition des femmes de l’Unesco. Actuellement, elle est retournée à Alger où elle a choisi de vivre.
Wassyla Tamzali, se pose la question suivante : « Quelle évolution est en cours pour les femmes, après le Printemps arabe ? »
Le dégel du printemps arabe.-
Nous pouvons dire que le printemps arabe se présente comme «un dégel ». Après chaque révolution, un régime autoritaire s’installe, porté par les élites des classes bourgeoises et les classes ouvrières. Ce dégel intervient après une période dite de glaciation organisée par les pouvoirs autoritaires qui ont pris le pouvoir après les indépendances (pour exemple en Algérie, le FLN qui reprendra toute sa culture de guerre utilisant l’assassinat et le coup d’état permanent pour régner). De ce fait on peut parler de « libération » mais pas de « liberté ». La violence anticoloniale, l’utilisation de la religion comme ciment vont s’abattre sur les pays décolonisés tandis qu’au plan international, les occidentaux n’ont pas perçu ce qui se passait
Pour Wassyla Tamzali, « aujourd’hui, ces blocs de glace se détachent »
Les principales étapes de la révolution tunisienne.
- C’est une révolte populaire
- Il y a eu rencontre entre la révolte populaire et la société civile tunisienne : cette double résonnance va internationaliser le mouvement
- L’arrivée des islamistes devant la scène surprend. Mais on découvre d’abord que c’est un pays pauvre. Ensuite que l’imprégnation religieuse y est très forte. Pourtant les femmes tunisiennes n’ont jamais voulu militer sur la base des textes religieux, elles ont toujours refusé l’interprétation féminine du Coran.
Religion et condition féminine, laïcité et liberté.
Wassyla Tamzali affirme que si on reste dans le cadre de la religion, on accepte la soumission de la femme. Il faut donc éduquer les masses sur le rôle de la religion. Selon elle, on peut être libertaire et musulman, croyant et féministe ; le féminisme islamique n’existe pas.
Il ya deux types de discours :
L’un, rassurant, fait remarquer que la manipulation des partis religieux était insoupçonnée, qu’ils étaient en recul par rapport à la scène de la rue. On ne peut que constater la proximité culturelle toujours entretenue entre les policiers (armée) et les islamistes car ils se battent pour la même cause : le pouvoir.
Par ailleurs en Tunisie, la vraie constitution c’est le code de la famille et ceci avant même l’Indépendance. Or les islamistes (le parti Ennadha) risquent de la vider de sa substance. Va-t-on appliquer la charia dans la famille, sur les femmes en Lybie ou en Tunisie ?
Wassyla Tamzali pousse un cri de colère contre ceux qui pensent que l’islamisme était postmoderniste et progressiste. Dans les pays du Maghreb, il n’y a jamais eu de révolutions laïques (comme en Turquie) et c’est la loi religieuse qui prévaut. Pour elle, les partis fondamentalistes portent en eux la radicalisation.
Le seul espoir de cohésion sociale, c’est la laïcité en tant que débat premier.
Radio-Canada -
Wassyla Tamzali, de la libération à la liberté (lundi 28 novembre 2011)
À travers son histoire familiale, Wassyla Tamzali raconte son Algérie, celle de ses parents et celle de ses grands-parents. Elle qui, à 20 ans, rêvait d'indépendance et de libération pour son pays salue aujourd'hui le rêve de liberté des jeunes qui font le printemps arabe, qui disent non et qui choisissent l'incertitude, cette « vertu de la révolution »
http://www.radio-canada.ca/emissions/le_21e/2011-2012/chronique.asp?idChronique=187962
Bibliographie
(2010) Burqa? En collaboration avec Claude Ber, édition Chèvre feuille Étoilée, 240p.
(2009) Une femme en colère : Lettre d’Alger aux européens désabusés. Éd. Gallimard, 149p.
(2007) Une éducation algérienne. De la révolution à la revanche des tribus. Éd. Gallimard
(2007) Le père, éd. Chèvre feuille Étoilée. Livre collectif (des filles parlent de leur père)
(2006) L’énigme du Maghreb, dirigé par Christine Ockrent, XO éditions, 2006 pp 336- 362
(1984) ABZIM : parures et bijoux des femmes d’Algérie. Éd. Entreprise algérienne de Presse
(1979) En attendant Omar Guetlato, regards sur le cinéma algérien. Éd. l’Harmattan.