Au festival de Cannes,
le souffle de Marilyn…
Marilyn en noir et blanc sur la croisette, splendide et émouvante sur l’affiche du
festival, bouche arrondie semble nous susurrer « pom pom pidou ».
Sa grâce intemporelle déjà enchante les lieux et Cannes sous son regard, renoue avec un cinéma où le rêve et le talent, l’excès, l’outrance et la fragilité, l’émotion révélaient des destins hors du commun.
Le festival de Cannes, le plus grand rassemblement du cinéma dans le monde (c’est ce que disent les Français) ouvrira ses portes ce soir, et pendant 11 jours la Croisette verra défiler, icônes confirmées, game boys et starlettes en mal de devenir, talons qui claquent et robes fendues, bijoux étincelants et décolletés vertigineux, dans un brouhaha et une effervescence brouillonne où le luxe pour un temps entre parenthèses, recouvrira la misère des nations qui s’écroulent.
Et pourtant…
Depuis des mois la France a respiré au souffle lourd de l’élection présidentielle. Une partie d’elle a entériné une gauche dont elle attend plus de justice et moins d’inégalités sociales ; plus de pouvoir d’achat et plus de bienfaits matériels.
Dans de gigantesques meetings et des lyrismes désuets, elle a vomi le capital, revendiqué le pouvoir du peuple et rejeté toutes les représentations de richesse jugées offensantes envers les précarités grandissantes et communes au plus grand nombre.
Et pourtant…
La même France, dès ce soir, sera scotchée devant ses écrans de télévision et se délectera pendant des heures des visions d’un monde scintillant où des femmes et des hommes, beaux, riches, heureux et souriants, prennent la pose, tournent et virevoltent dans la lumière des projecteurs. Un monde lisse et sans aspérité, élégant et précieux, loin, très loin du SMIC et du RSA, loin des sans papiers, des émigrés et des cités de banlieues, tout près du rêve et des contes : il était une fois un prince et une princesse, dont nous sommes tous étrangement nostalgiques.
Alors, que faut-il voir dans ces contradictions singulières ?
L’heureuse propension que nous avons à la multiplicité, ou la simple traduction d’une inconstance tragique?
Un peu des deux sans doute.
Mais, peut-être n’est-ce que la beauté et l’art qui d’un coup pansent les plaies, donnent à voir autre chose autrement, loin des batailles et des fureurs, loin des combats ?
Personnellement je le crois comme je crois que l’art est en tout, alors regardons sans complexe ce nouveau festival et laissons l’insouciance nous troubler encore, légère comme les robes qui vêtiront les corps, et le souffle de Marilyn au bord de l’extase, sublime…