Pus de 3 millions de chômeurs en France
Le nombre de chômeurs a dépassé trois millions en août en France, a confirmé mercredi le ministre socialiste du Travail, qui en a imputé la responsabilité au gouvernement de droite précédent.
"C'est mauvais, c'est forcément mauvais. J'ai d'ailleurs dit au cours de ces dernières semaines que, au rythme qui était déjà acquis dans l'été, je m'attends bien entendu à ce que le chiffre (...) de trois millions de chômeurs en France sera dépassé", a dit Michel Sapin sur France 2. "C'est le résultat d'une politique, c'est au fond les trois millions de chômeurs que nous avons trouvés en arrivant."
Michel Sapin, qui anticipait de quelques heures l'annonce officielle d'une hausse du chômage pour le 16e mois de suite, a estimé que c'était une raison du changement de président, de majorité et de gouvernement en France, en mai et juin derniers.
Il a laissé entendre que le gouvernement précédent et les chefs d'entreprise avaient "caché, dissimulé ou repoussé de mois en mois", pour des raisons électorales, des plans sociaux qui, aujourd'hui, sont en train d'exploser.
"Donc, je dirais que ce n'est pas quelque chose qui est dû à notre politique", a ajouté le ministre du Travail. "C'est malheureusement ce qui est dû à la politique précédente."
Il faut remonter à juin 1999 pour retrouver un nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A supérieur à trois millions en France métropolitaine (3.030.100). Selon l'assurance-chômage, ils seront 3.083.800 fin 2012, 3.208.500 fin 2013.
Michel Sapin a reconnu que le gouvernement actuel avait la responsabilité de mettre en oeuvre des politiques en faveur de l'emploi et limitant les effets négatifs des plans sociaux.
François Hollande a promis le 9 septembre d'inverser la courbe du chômage en France d'ici fin 2013 et demandé aux partenaires sociaux de conclure d'ici fin 2012 un "compromis historique" sur la réforme du marché du travail.
Le secrétaire général de Force Ouvrière, Jean-Claude Mailly, a estimé que l'objectif d'une inversion de la courbe du chômage d'ici fin 2013 serait "difficilement" atteignable dans un contexte de croissance nulle ou "molle".
"C'est un pari risqué", a-t-il dit sur Europe 1. "Quand on a une croissance proche de zéro, le chômage augmente, il y a un effet quasi mécanique puisque l'activité n'est pas là."
LICENCIEMENTS "BOURSIERS"
Son homologue de la CFDT, François Chérèque, a cependant jugé sur RMC et BFM-TV que le phénomène n'était pas "inéluctable", bien que la France connaisse le chômage de masse depuis 30 ans.
"Je crains qu'on ne s'habitue trop à cette situation", a-t-il poursuivi. "Il est temps d'aller sur le fond (...) Nous avons un tissu productif qui n'est pas assez efficace et compétitif(...) La France n'est pas adaptée à la mondialisation."
Les principales centrales syndicales et organisations patronales entreront dans le vif du sujet le 4 octobre avec le début de négociations sur la sécurisation des emplois, dont la contrepartie est l'amélioration de la compétitivité des entreprises et une "flexibilité" accrue du marché du travail.
Un mot - "flexibilité" - que récusent François Chérèque et Jean-Claude Mailly.
Pour le dirigeant de la CFDT, qui quittera ses fonctions en novembre avant la fin de la négociation, le marché du travail français est déjà "hyper-flexible" du fait d'un recours massif des entreprises aux contrats courts ou à durée déterminée.
"Si le patronat veut plus de flexibilité (...) on n'est pas d'accord", a renchéri son homologue de FO, pour qui "ce n'est pas parce que le président de la République veut un compromis historique que je vais dire 'oui chef'."
"Qu'il fasse une autre politique économique et on aura moins de chômeurs", a ajouté Jean-Claude Mailly.
Prié de dire s'il préparait une loi interdisant les licenciements "boursiers", Michel Sapin a pour sa part répondu : "C'est plus qu'à l'étude, c'est un sujet dont les partenaires sociaux (...) sont aujourd'hui saisis."
"J'ai demandé aux partenaires sociaux (...) de négocier plusieurs aspects qui ne vont pas", a-t-il expliqué. "Il y trop de précarité au travail, le contrat à durée indéterminée (...) est devenu l'exception. Aujourd'hui les entreprises s'adaptent dans la brutalité, les plans sociaux, alors qu'il faudrait pouvoir anticiper les choses."
"Il ne s'agit pas d'interdire, il s'agit de faire en sorte que les conditions, les règles qui régissent les licenciements soient revues", a-t-il ajouté.
Emmanuel Jarry, avec Jean-Baptiste Vey, édité par Patrick Vignal - PARIS (Reuters) -